Se caresser les tétons activerait la même région de notre cerveau qu’une stimulation clitoridienne et pourrait provoquer un orgasme. Waouh !
Une femme en culotte bleue est allongée, torse nu, sur un canapé. Pendant quelques minutes, elle stimule ses tétons en les pinçant et en les caressant. Elle se « branle » littéralement les seins, jusqu’à se cambrer en gémissant. L’héroïne de cette vidéo amateur, postée sur Pornhub sous le titre Cette fille jouit en s’amusant avec ses tétons, serait-elle dotée d’un pouvoir surnaturel et unique ? Non. Elle vient juste de se procurer un « orgasme des seins ». Et on ne vous parle pas là d’une invention du magazine Cosmopolitan. Il suffit de se rendre sur la plateforme américaine Reddit, où de nombreuses femmes témoignent de leur capacité à jouir avec de simples caresses mammaires, pour s’en convaincre.
Le boobgasm (en anglais) existe bel et bien. « J’ai eu un copain qui disait que c’était comme si j’avais trois clitoris », écrit une internaute. Une autre, qui gère la chaîne de porno amateur Homemade Horny Girl, sur Pornhub, accepte de nous raconter. Elle a découvert ces nouvelles sensations avec son compagnon, après plusieurs tentatives. « Il a surtout utilisé ses mains, même si sa bouche et sa langue pouvaient aider à changer le type de stimulation. Il a fallu une bonne quinzaine de minutes avant que je jouisse enfin. C’est un orgasme, sans aucun doute ; mon corps tremble et se contracte, le plaisir se diffuse. Maintenant, j’y suis tout à fait habituée et je peux jouir en me stimulant seule », raconte-t-elle. Dans une de ses vidéos, elle se donne même un orgasme en passant un vibromasseur sur sa poitrine.
Mais nul besoin de faire du porno pour goûter à la volupté du sein. Pour Nora, Parisienne qui a également expérimenté la chose, le climax est arrivé sans l’avoir vraiment cherché. Cela s’est passé par un bel après-midi d’un week-end en bord de mer, avec son partenaire de l’époque. « Les préliminaires ont duré très longtemps. On s’embrassait, on se caressait, mais pas en dessous de la ceinture. Voyant que cela me faisait plus d’effet que d’habitude, il a dû s’occuper de mes seins pendant quarante minutes, jusqu’à me faire jouir, exactement comme s’il y avait eu une stimulation génitale directe », explique-t-elle.
“Tout est orgasmique chez la femme”
Ces ressentis sont une preuve supplémentaire, pour qui en doutait encore, de la puissance orgasmique du corps des femmes. Ce phénomène a même une explication scientifique. En 2011, un groupe de chercheurs et de chercheuses a publié un article à ce sujet dans The Journal of Sexual Medicine. Ils et elles avaient demandé à des femmes de se stimuler en plusieurs endroits de leurs corps pour observer quelles parties du cerveau étaient activées à la suite de ces gestes. Les résultats ont montré que la stimulation des tétons et des seins activait une zone du cerveau à cheval sur celle qui se « réveille » lors d’une stimulation vaginale, clitoridienne ou du col de l’utérus. Autrement dit, ces différents stimulus envoient des informations dont les zones de réception se trouvent au même endroit dans notre cerveau, le cortex sensoriel génital. « Avant, on pensait que le téton n’activerait que la région liée à la poitrine. Or, il semble que cela active bien la “pompe” du plaisir. Beaucoup de femmes en témoignent », explique Nan Wise, neuroscientifique, sexologue, coautrice de cette étude et autrice de Why Good Sex Matters1. « Tout est orgasmique chez la femme. Un doigt de pied peut être érotisé, de même qu’une oreille », complète la gynécologue-obstétricienne Odile Buisson, connue pour ses recherches sur le clitoris et le plaisir féminin. Certaines éprouvent même du plaisir d’origine « cervicale », c’est-à-dire qu’elles peuvent jouir de pressions sur le col de l’utérus pendant une pénétration.
Que le sein puisse être lui aussi jouissif n’aurait donc rien d’étonnant. La chercheuse ajoute que l’excitation sexuelle et l’érection du téton suscitées par la succion d’un mamelon sont associées à une augmentation de l’ocytocine, hormone de l’attachement, la même qui est libérée pendant l’allaitement. « On pense que l’ocytocine pourrait interférer dans les phénomènes d’attachement du couple. Une étude américaine de 2015 avance que l’intimité de la sexualité des seins crée un groupe de sensations qui permet l’empathie, l’engagement, la communication », poursuit-elle.
La “masturbation” mammaire
Milène Leroy, sexologue et psychothérapeute, autrice du site Sexologie-couple.com, a justement constaté que certaines femmes découvrent le plaisir de la succion du téton pendant ou après une période d’allaitement, et en éprouvent parfois de la gêne. La praticienne tente alors de faire comprendre que le sein est une zone érogène comme une autre et incite celles qui le souhaitent à le mobiliser, pour elles, dans leur sexualité. « Cela passe par le fait de dire comment on veut être caressée ou de demander des caresses sans qu’il y ait forcément un rapport », dit-elle. Pratiquer la « masturbation » mammaire en se caressant soi-même peut s’avérer une piste intéressante. Pour ensuite faire découvrir (ou pas) ses apprentissages à son ou sa partenaire. « Loin du cliché binaire de l’homme qui va mater des nichons ou qui pelote sa femme en rentrant du boulot, c’est l’idée de bomber la poitrine et de dire : “Viens, on va jouer. J’en ai besoin”, poursuit la sexologue. L’objectif est que les femmes se réapproprient cet endroit, qui leur appartient. »
Je pense, donc je jouis
Dans un article scientifique paru en 2016, la chercheuse américaine Nan Wise a aussi démontré que le simple fait de penser à une stimulation des tétons activait la même zone que le fait de penser à une stimulation du clitoris. De plus, elle a observé que ces pensées provoquaient un marquage du cerveau encore plus important en certains endroits que le fait de se toucher directement. Des conclusions qui pourraient expliquer que certaines femmes parviennent à l’orgasme par la simple pensée.
- Why Good Sex Matters, de Nan Wise. Houghton Mifflin Harcourt, 2019.[↩]
