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L’essai coup de poing : « Pour une éco­lo­gie pirate », de Fatima Ouassak

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Fatima Ouassak © Charlotte Krebs

Deux ans après La Puissance des mères, ouvrage qui appe­lait à poli­ti­ser la mater­ni­té, la poli­to­logue publie un nou­vel essai dans lequel elle dénonce les méfaits d'une éco­lo­gie de classe, qui s’adresse d’abord aux per­sonnes urbaines, blanches et de classe moyenne.

C’est un livre sur l’écologie qui parle, en réa­li­té, des ban­lieues. Car il s’agit là d’un seul et même sujet, selon son autrice, Fatima Ouassak. Deux ans après La Puissance des mères (éd. La Découverte), ouvrage qui appe­lait à poli­ti­ser la mater­ni­té, elle publie Pour une éco­lo­gie pirate, deuxième volet d’une trilogie. 

La poli­to­logue y déve­loppe une pen­sée ancrée dans les espaces péri­phé­riques, en par­tant de ce constat : les habitant·es des ban­lieues se mobi­lisent très peu pour l’écologie, alors que ce sont les premier·ères concerné·es par la pol­lu­tion de l’air, l’insalubrité, la béto­ni­sa­tion et la mal-​bouffe indus­trielle. Faut-​il pour autant en conclure qu’ils et elles n’en ont rien à secouer ? Que nen­ni. La faute à une éco­lo­gie de classe, qui s’adresse d’abord aux per­sonnes urbaines, blanches et de classe moyenne. 

La démons­tra­tion menée par cet essai édi­fiant consiste à révé­ler com­ment les descendant·es de l’immigration afri­caine ont été entravé·es dans leur par­ti­ci­pa­tion poli­tique, donc éco­lo­gique. Car dans ces quar­tiers, tout est mis en place pour que l’on ne se ras­semble pas. On y a trop chaud l’été et trop froid l’hiver. Ces espaces, relé­gués à la marge par les pou­voirs publics, font ain­si les frais à la fois d’une ségré­ga­tion socio­ra­ciale et d’inégalités envi­ron­ne­men­tales. Bref, elle signale ici l’échec de ce qu’elle nomme « l’écologie majo­ri­taire », égra­ti­gnant au pas­sage une gauche qui pré­fère soi­gneu­se­ment évi­ter de pen­ser ensemble ques­tions raciales et écologie.

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La fon­da­trice du Front de mères, pre­mier syn­di­cat de parents d’élèves de quar­tiers popu­laires, s’appuie ici sur son expé­rience de mili­tante sur le ter­rain : celle qui s’est bat­tue pour obte­nir un repas végé­ta­rien dans la can­tine de sa fille a aus­si cofon­dé, chez elle, à Bagnolet (Seine-​Saint-​Denis), Verdragon, pre­mière mai­son de l’écologie popu­laire. Elle écrit : « Dans les quar­tiers popu­laires, la ques­tion éco­lo­gique ne peut pas être celle de la pro­tec­tion de la terre – de l’environnement, de la nature, du vivant ; elle doit être celle de sa libé­ra­tion. » La tran­si­tion éco­lo­gique sera l’affaire de tous·tes ou ne sera pas, et le béton des cités consti­tue un ter­reau insur­rec­tion­nel qui ne demande qu’à éclore.

Pour une éco­lo­gie pirate. Et nous serons libres, de Fatima Ouassak. Éd. La Découverte, 272 pages, 16 euros. Paru le 9 février.

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