Quatre étudiantes genevoises élaborent la contraception de demain : un préservatif en cellulose, entièrement biodégradable et non allergène.
Et si demain l’écologie s'invitait sous les draps ? C’est le pari que se sont lancé quatre étudiantes de l’université de médecine de Genève. Dans les laboratoires de la faculté mis à leur disposition pour l’occasion, Ezgi Gozlugol, Khatiba Khatibi, Ezia Oppliger et Emma Jacques tentent de mettre au point un préservatif en cellulose, entièrement biodégradable. Leur projet, baptisé “Ose !”, naît en janvier 2020, lors d’un cours où les élèves devaient créer un produit médical issu de leur imaginaire. « On est toutes les quatre très sensibles à tout ce qui touche à la santé sexuelle, indique Khatiba Khatibi. De plus, dans notre entourage, on connait pas mal de monde allergique au latex. Alors, on a eu envie de travailler sur des préservatifs faits dans une matière éco responsable et non-allergène. » Bingo. Un peu moins d’un an après ce cours initial, les quatre étudiantes remportent le prix InnoSciences de leur faculté, visant à récompenser et à promouvoir un projet. Ose ! quitte alors les bancs de la fac pour ceux des laboratoires de l’université, où les étudiantes soutenues par leurs professeurs développent depuis leurs fameux préservatifs.
Pour ce faire, leur choix s'est porté sur la cellulose bactérienne, une matière organique qui compose la paroi des végétaux. « D’un point de vue écologique, la cellulose est biodégradable, assure Emma Jacques. Il y a dans la nature des enzymes qui dégradent naturellement la cellulose. » Une révolution, car nos préservatifs d’aujourd’hui en latex synthétique ou en polyuréthane (un dérivé du pétrole) ne se recyclent pas. En finissant généralement leur vie dans les amas de plastiques des océans, les 27 milliards de “capotes” produites chaque année sont ainsi un véritable fléau pour l’environnement.
Une avancée pour la santé sexuelle
Au-delà de son aspect écologique, le préservatif en cellulose pourrait également permettre de faire avancer la santé sexuelle. « La cellulose est biocompatible avec le corps humain, poursuit Emma Jacques. Les personnes allergiques aux préservatifs en latex pourront donc utiliser ce moyen de contraception sans risquer une réaction. » « Et de plus en plus de femmes veulent arrêter la pilule en raison de ses effets négatifs sur leur santé, ajoute Khatiba Khatibi. Cela leur permettrait d’utiliser un moyen de contraception bon pour leur corps et pour la planète. » Ces préservatifs de demain seraient également plus fins que leurs actuels concurrents. La cellulose étant une matière très fine, elle permettra également d’avoir plus de sensation qu’un préservatif classique. Fini les « je n’aime pas mettre de capote, je ne ressens rien avec » !
Encore loin de trôner sur toutes les tables de chevet, l'objet n'existe seulement que dans le laboratoire suisse. « On ne peut pas encore utiliser la cellulose telle quelle car elle n’est pas assez résistante et élastique, indique Khatiba Khatibi. On travaille actuellement sur la bonne recette pour pouvoir l’utiliser. On a encore beaucoup de chemin avant d’avoir un préservatif en cellulose entre les mains, mais on y croit. »