carte saint valentin
©message d'amour

Saint-​Valentin : si vous saviez ce que vous fêtez ce jour-​là, vous en ava­le­riez vos Mon Chéri de travers

Faux pétales de roses, pré­sents dou­teux et petits dîners (à empor­ter, Covid oblige). Aujourd'hui, c'est la fête à neu­neu, celle où il est de bon aloi de ran­ger la hache de guerre du couple, de s'asseoir sur sa charge men­tale et de comp­ter fleu­rette à celui ou celle à qui on a vague­ment rou­lé une pelle lors de cette soi­rée de 2006 et avec qui, on ne sait plus vrai­ment sur quel mal­en­ten­du, on a fini par déci­der de se mettre en ménage. Ça va, ça va, on rigole, nous aus­si, on a un cœur tendre, quelque part, là, tout au fond.
On ne vous refe­ra pas dans cet article le coup de « la Saint-​Valentin, c'est une fête hyper com­mer­ciale » (vous-​mêmes qui, fraî­che­ment en couple, ne savez pas si vous devez offrir « un petit quelque chose » à votre nou­veau +1, on com­pa­tit). On a par contre fouillé nos livres d’histoire pour ten­ter de com­prendre com­ment s'est déci­dé qu'une fois par an à la fin de l'hiver, toute la pla­nète entière devrait offrir des strings ficelle rouges à l'être cher. Voici donc trois légendes sur l'origine de cette célé­bra­tion, comme autant de fables à chu­cho­ter au creux de l’oreille de votre Valentin·e chéri·e en le/​la regar­dant avec des yeux de mer­lan frit. 

Ne tirez-​pas sur l’oiseau dragueur 

Pour enta­mer notre voyage sur les traces de la Saint-​Valentin, remon­tons le temps de quelques siècles. Dans l’Angleterre médié­vale du 14e siècle pour être exact. A cette époque, le mois de février rime avec retour du prin­temps (faut dire que la per­fide Albion ne peut pas se per­mettre d'être trop exi­geante en terme de degrés cel­sius). Les arbres bour­geonnent, le soleil pointe le bout de son nez mais sur­tout, c’est le début de la joyeuse sai­son des amours pour… les oiseaux. Bien avant que les humains ne s’offrent des Mon Chéri, il était donc de cou­tume d’observer les grives, per­drix et autres pies s’adonner à leurs ébats le 14 février. Et jus­te­ment, l’un de ces vola­tiles res­sent une cer­taine pres­sion. « À mi-​février, bon merle doit nicher », qu’ils disent, ces sata­nés poètes anglais. Mais pas facile pour un merle de trou­ver chaus­sure à son ergot. Bec au vent, celui-​ci trouve pour­tant l’élue de son cœur, là, tout près sur un toit de chaume. Fidèle à une tra­di­tion qui per­du­re­ra jusqu’à l’ère du Netflix and chill, notre ami apporte à sa dul­ci­née un pré­sent. Pour cette fois-​ci, ce sera une belle poire flé­trie. Touchée par ce cadeau de choix, la mer­lette est conquise. Le merle est sau­vé, il pour­ra relire sans trem­bler Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare, qui fait dire à Thésée, duc d'Athènes et orni­tho­logue à ses heures : « Bonjour mes amis ! La Saint-​Valentin est pas­sée. Les oiseaux de ces bois ne commencent-​ils pas à s’accoupler aujourd’hui ? »

Valentin, loin des yeux, près du cœur 
800px Saint Valentine facial reconstruction 1

Voici à quoi res­sem­ble­rait notre cher Valentin
selon une recons­truc­tion faciale 3D
faite par Cícero Moraes

Laissons merles et autres moi­neaux der­rière nous pour nous inté­res­ser à l’homme qui a lais­sé son nom à la fête. Car avant de deve­nir le saint-​patron des amou­reux, Valentin de Terni était un prêtre chré­tien tout ce qu’il y a de plus ordi­naire. Enfin, pas tant que ça. En ce troi­sième siècle, à l’heure où le monde romain se chris­tia­nise, l’homme de dieu joue avec le feu. Son Empereur du moment, Claude II le Gothique (sur­nom­mé « le cruel » en cou­lisses), se bat farou­che­ment pour faire inter­dire le mariage. Il craint en effet que ses jeunes sol­dats deviennent moyen chauds pour aller se faire tuer à la guerre quand ils peuvent res­ter tran­qui­lou­bi­lou à la domus se faire câli­ner par domi­na.
Fidèle à sa répu­ta­tion de Cruello d'enfer, Claude tue les mau­dits amou­reux qui tentent de scel­ler leur union reli­gieu­se­ment. Car vous l'aurez com­pris, c'est en réa­li­té le chris­tia­nisme qui chif­fonne l’ami Claude.
Dans son coin de Rome, Valentin ne l’entend pas vrai­ment de cette oreille. À l’abri du regard mena­çant de l’empereur, le prêtre décide de marier à tour de bras tous les jeunes gens qui lui en font la demande, façon prêtre Elvis de casi­no de Vegas avant l'heure. Mais toutes les bonnes choses ont une fin, et Valentin finit par être décou­vert. Emprisonné, le prêtre n’arrête pas pour autant de jouer avec l’amour. Faute de Tinder, c’est dans l’enceinte même de sa pri­son qu’il va mat­cher. Avec Julia, la femme de son geô­lier (oui, Valentin aime beau­coup se com­pli­quer la vie). Une jeune fille qu’on ima­gine pleine de vie mais qui, outre son devoir d’amener de la nour­ri­ture au prêtre enfer­mé, a la par­ti­cu­la­ri­té d’être aveugle de nais­sance. Depuis sa cel­lule, Valentin la séduit en lui décri­vant ce monde qu’elle ne peut voir. Dans un retour­ne­ment de situa­tion à faire pâlir les scé­na­ristes de La Chronique des Bridgerton, Julia retrouve la vue (on vous rap­pelle à toutes fins utiles que Valentin devien­dra Saint). Elle ne pour­ra mal­heu­reu­se­ment pas pro­fi­ter long­temps de l'image de son amou­reux, puisque ce miracle par­vient aux oreilles de Claude-​le-​cruel. Pas fran­che­ment d’humeur à ces miè­vre­ries, il ordonne la déca­pi­ta­tion de Valentin pour le 14 février. Ce der­nier a tout de même le temps d’écrire vite fait, bien fait, une der­nière lettre à sa bien-​aimée signée « Ton Valentin ». Une légende est née. 

Les luper­cales, ou la lote­rie de l’amour

Terminons en res­tant dans la Rome antique. Au pied du mont Palatin, du 13 au 15 février, la fête des luper­cales bat son plein en l'honneur de Faunus, dieu de la forêt et des trou­peaux. On mange, on boit, on sacri­fie des boucs, le nec-​plus-​ultra de l'époque pour des soi­rées réus­sies. Dans les rues de Rome, des hommes courent nus en riant aux éclats. Sur leur tra­jet, ils s'amusent régu­liè­re­ment à fouet­ter, comme ça en pas­sant, des femmes avec leur lanières en peau de bouc. N’y voyez aucun plai­sir sado­ma­so­chiste, les vic­times sont répu­tées bien heu­reuses de se faire vio­len­ter : ce coup de lanière est en effet pré­sage d’une gros­sesse dans l’année et, mieux encore, de gros­sesse heu­reuse !
Après la course, un grand ban­quet prend place. On ignore si Astérix y a par­ti­ci­pé, mais une chose est sûre : le petit gau­lois aurait eu toutes ses chances de trou­ver l’amour. En effet, le repas donne l’occasion à une petite lote­rie peu banale. Les jeunes gens céli­ba­taires ins­crivent leur pré­nom sur un papier pla­cé dans une urne, avant qu’un enfant inno­cent aille à la pioche. Les paires ain­si for­mées sont des­ti­nées à res­ter ensemble tout au long de la soi­rée, avant de choi­sir s’ils décident de se marier. Un concept digne de l’émission de télé­réa­li­té d’M6, Mariés au pre­mier regard. Comme vous pou­vez vous en dou­ter, les Romains et Romaines raf­folent de cette fête. Mais le pape Gélase II vien­dra sif­fler la fin des réjouis­sances en 496, pas vrai­ment friand des fes­ti­vi­tés païennes. Vous vous sou­ve­nez de ce bon vieux prêtre Valentin ? Ce sera désor­mais lui que l’on célè­bre­ra le 14 février.

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