Moi presidente dans le retro 3

Dans le rétro : une com­pi­la­tion de can­di­da­tures à l'élection pré­si­den­tielle pas très sérieuses

Chaque semaine, nous vous pro­po­sons dans notre news­let­ter spé­cial élec­tion pré­si­den­tielle (ins­crip­tion gra­tuite par là) un coup d'œil dans le pas­sé des pro­grammes poli­tiques d'aspirant·es à la fonc­tion suprême. Voici ces explo­ra­tions rassemblées.

1965 : Pierre Dac, le vision­naire de la trottinette

C'est en can­di­dat lou­foque tota­le­ment assu­mé que l'humoriste popu­laire, Pierre Dac, se pré­sente à l’élection pré­si­den­tielle de 1965, la toute pre­mière au suf­frage uni­ver­sel direct. Maître de l’absurde, il pro­pose « pour sau­ver une cir­cu­la­tion pari­sienne au bord de l’asphyxie, de déve­lop­per la pra­tique du bouche-​à-​bouche de métro et de rem­pla­cer les voi­tures offi­cielles par des trot­ti­nettes ».

Sur un tout autre sujet, Dac ambi­tionne de « rele­ver le smic avant qu’il ne tienne plus debout ». Aussi peu sérieuse soit la can­di­da­ture de Pierre Dac, elle agace les hautes sphères poli­tiques. Si bien que le géné­ral de Gaulle lui demande de la reti­rer. Dommage, il était plu­tôt vision­naire… sur les trottinettes.

De 1965 à 1974 : le dro­la­tique Ferdinand Lop

Dans la famille des hur­lu­ber­lus à vel­léi­té pré­si­den­tielle, on demande Ferdinand Lop. Cet éter­nel can­di­dat mal­heu­reux s’est pré­sen­té à toutes les élec­tions pré­si­den­tielles entre 1965 et 1974, année de son décès. Parmi ses pro­po­si­tions toutes plus ubuesques les unes que les autres, on retient celle d’amé­na­ger un trot­toir rou­lant dans les rues pari­siennes pour faci­li­ter le tra­vail des pros­ti­tuées qui n’auraient alors plus à « faire les cent pas le long des rues » en atten­dant leurs clients (« c’est fati­gant pour les gui­bolles, parole, parole »).

Impossible d’en savoir plus sur les moda­li­tés du dis­po­si­tif, l’homme refu­sait de les dévoi­ler de peur que d’autres s’en ins­pirent. Davantage figure popu­laire que can­di­dat, Ferdinand Lop n’arrivera jamais à être pris au sérieux par ses contemporain·nes, on se demande bien pourquoi.

Encore ce bon vieux Ferdinand Lop

Cette fois, focus sur une autre pro­po­si­tion phare de celui qui s’est pré­sen­té à toutes les élec­tions pré­si­den­tielles entre 1965 et 1974 : le pro­lon­ge­ment de la rade de Brest jusqu'à Montmartre (XVIIIème arron­dis­se­ment) et l’extension du bou­le­vard Saint-​Michel (Vème) jusqu’à la mer.  Un rai­son­ne­ment fina­le­ment pas si gro­tesque lorsqu’on se sou­vient que l’actuelle can­di­date PS, Anne Hidalgo, évo­quait pas plus tard qu’en 2020 l’idée d'« une grande région capi­tale qui irait jusqu’à la mer ». P't'être qu’on fini­ra par l'avoir, notre Paris plage – et pour de vrai cette fois !

2002 : Jean-​Marie Le Pen, le nat(ion)aliste

Le papa de Marine est très famille. Enfin, si tant est que celle-​ci soit consti­tuée d’un couple hété­ro dont les ancêtres sur six géné­ra­tions sont nés sur le sol hexa­go­nal et d’autant de mar­mots qu’il est pos­sible d’en faire. Pour col­ler à ses fan­tasmes nat(ion)alistes, Le Pen senior a donc bien évi­dem­ment ins­crit dans son pro­gramme l’abrogation des lois sur l’IVG, les­quelles vont « contre le bien com­mun de notre pays ». 

Là où il se montre plus ori­gi­nal, c’est sur la façon dont il convient de « reva­lo­ri­ser la place des familles au sein de la com­mu­nau­té natio­nale » : « Les familles de trois enfants, qui repré­sentent 8% de la popu­la­tion du pays et assurent à elles seules près du tiers du renou­vel­le­ment des géné­ra­tions, ne consti­tuent que 5% des votants. L’équité vou­drait donc que les parents, tuteurs natu­rels et légaux de leurs enfants, puissent exer­cer en leur lieu et place, durant le temps de la mino­ri­té de ceux-​ci, non seule­ment leurs droits civils, mais aus­si leurs droits civiques. » 

L’ancien dépu­té appelle cela le « suf­frage uni­ver­sel inté­gral ». Une rémi­nis­cence voi­lée de ses pires cau­che­mars ? La pro­po­si­tion a en tout cas été aban­don­née par le Rassemblement National, ex-​FN. Un peu comme Jean-​Marie Le Pen, évin­cé du par­ti poli­tique qu’il a fon­dé par sa propre fille en 2015. Faites des gosses, qu’il disait…

Depuis 2002 : Cindy Lee, la can­di­date de l'hédonisme

En 2002, Cindy Lee - Isabelle Laeng à l’état civil – se pré­sente à l'élection pré­si­den­tielle avec son par­ti hédo­niste créé pour l’occasion, le Parti du plai­sir, sans par­ve­nir à récol­ter les 500 parrainages. 

Elle comp­tait sur cer­taines de ses mesures, comme l’ouverture de clubs échan­gistes à tarifs sociaux, l’instauration d’un jour férié dédié à l’amour ou la créa­tion d'un Samu sen­ti­men­tal pour venir en aide aux per­sonnes soli­taires en mal d’amour. Elle se pré­sen­te­ra chaque année jusqu'en 2017, sans jamais pas­ser le pla­fond de verre des par­rai­nages et est à nou­veau can­di­date en 2022.

Depuis 2016 : Nicolas Dupont-​Aignan, le cas­seur de cailloux 

Retour en mars 2016. Au len­de­main de l’annonce de sa can­di­da­ture (anti­ci­pée) à l’élection pré­si­den­tielle de 2017, le can­di­dat Debout la France, Nicolas Dupont-​Aignan for­mule une proposition-​solution pour la ges­tion des dji­ha­distes français·es sur le retour : « La mesure qui s’impose, […] c’est l’arrestation pré­ven­tive des 250 dji­ha­distes de retour en Syrie, que je veux éloi­gner sur un ter­ri­toire loin­tain. J’ai par­lé des îles Kerguelen. » 

Il est bon de rap­pe­ler à ce stade que cet archi­pel, grand comme l’île de France et coin­cé entre l’Antarctique, l’Afrique du sud et l’Australie, pos­sède l’un des cli­mats les moins hos­pi­ta­liers du monde et l’un de ceux les plus expo­sés au réchauf­fe­ment climatique. 

Et parce que c'est une idée qui le sin­gu­la­rise dans le bac des réacs, le can­di­dat mal­heu­reux remet régu­liè­re­ment sa pro­po­si­tion sur la table. Comme en 2019, à l’occasion du rapa­trie­ment de 130 dji­ha­distes en France ou en 2021, dans une tri­bune publiée chez Valeurs Actuelles. Oui, le dépu­té de l'Essonne est un peu cet oncle gênant qui, à table, reba­lance quinze fois la même idée pro­voc' jusqu'à ce qu'il requière l'attention qu'il croit mériter. 

2017 : l'ovni Jacques Cheminade

Candidat à l'élection pré­si­den­tielle de 2017, Jacques Cheminade avait fait de la ques­tion extra­ter­restre son fer de lance. Une des mesures de son pro­gramme assez lunaire – sans mau­vais jeu de mot – était de colo­ni­ser Mars et d'indus­tria­li­ser la lune. Le tout, selon l’ancien can­di­dat de Solidarité et Progrès, grâce à la « mise en place d’un cor­ri­dor ther­mo­nu­cléaire entre la Terre et Mars, via la Lune ». Tout sim­ple­ment. Dommage que Cheminade ne se pré­sente pas pour l’édition 2022, il aurait cer­tai­ne­ment trou­vé un sou­tien de taille du côté d’Elon Musk. 

2017 : François Asselineau, le vision­naire de la théo­rie du complot

Visionnaire, ou simple pythie tech­no­phobe ? En 2017, François Asselineau était le seul can­di­dat à la pré­si­den­tielle à se sou­cier des puces élec­tro­niques. Dans son pro­gramme, l’homme poli­tique sou­hai­tait inter­dire tout « puçage » des êtres humains et pro­met­tait de sai­sir l’Organisation des Nations unies pour que cette inter­dic­tion soit uni­ver­selle. 

Il esti­mait que ces implants repré­sen­taient « une menace pour l’humanité entière » et qu’ils se déve­lop­paient « à toute vitesse », selon Le Monde. Force est de consta­ter qu’à part une opé­ra­tion en Suède en 2015 et une en Belgique en 2017, le phé­no­mène reste très à la marge et équi­vaut plus à une simple expé­ri­men­ta­tion qu’à une véri­table mise en place. Mais atten­tion, pour François Asselineau, le dan­ger du puçage n’a pas dis­pa­ru. Ce serait même la pro­chaine étape après le pass vac­ci­nal. On croyait pour­tant être déjà pucé·es depuis notre pre­mière dose de vac­cin… Notons que depuis, celui qui est aus­si fer de lance du Frexit a été accu­sé d'agression sexuelle sur deux membres de son parti.

2017 : tou­jours François Asselineau

Le pro­gramme de François Asselineau ne s’embête pas d’un volet dédié à l’égalité des genres ou de plan de lutte contre les vio­lences sexistes et sexuelles. Une seule occu­rence advient quand y cherche le mot « femme » : la pro­messe de rem­pla­cer le terme de « Première Dame de France » par « Femme du pré­sident de la République ». 2022. Plus aucune men­tion des femmes, pas même celle du pré­sident, dans le nou­veau pro­gramme du can­di­dat UPR. Rassurez-​vous, le pas­sio­na­ria du Frexit n’en pense pas moins et a à nou­veau pré­ci­sé à la presse en mai 2021 que son épouse (dont il pré­cise tout de même qu’elle est une « uni­ver­si­taire [qui] a eu son bac à 15 ans ») sera bel et bien « Femme du pré­sident de la République » s’il venait à être élu. Probablement au grand désar­roi de cette der­nière, il n’a pas obte­nu les par­rai­nages néces­saires pour aller plus loin. Mari d’universitaire, c’est pas si mal ?

2017, Didier Tauzin en avance sur le Z

Le géné­ral Didier Tauzin pro­pose dans son pro­gramme de faire une « pause migra­toire de vingt ans » de façon à avoir, selon lui, le temps de « recréer une nation sou­dée » et de « rebâ­tir la France ». « Cette immi­gra­tion est en grande majo­ri­té musul­mane, je n’ai stric­te­ment rien contre les musul­mans mais l’islam n’est pas du tout com­pa­tible avec notre civi­li­sa­tion chré­tienne », se justifiait-​il à l’époque.

Bon, main­te­nant qu'en 2022 le géné­ral s'est fait dou­bler par sa droite par Éric Zemmour, on trouve l'ambition de « seule­ment » vingt ans un peu fade. On espère que ce der­nier sau­ra lui rendre gré de cette pierre à l'édifice faschiste. 

2022 : Philippe Furlan, le cer­veau

Aujourd'hui, notre rubrique « dans le rétro » ne l'est pas tant que ça puisqu'il s'agit d'une pro­po­si­tion de Philippe Furlan, illustre incon­nu qui a ten­té l'aventure pré­si­den­tielle au début de l'année 2022 et a même eu droit à un petit por­trait dans Le Progrès, le jour­nal de sa région qui l'a affu­blé du facé­tieux sur­nom de « can­di­dat "clown" », avant de dis­pa­raître dans les limbes des Internets aus­si rapi­de­ment qu'il y était apparu.

Pourquoi voter Philippe ? Essentiellement « pour une France sans impôt », à en croire sa devise de can­di­dat. Celui dont la bio­gra­phie offi­cielle, sur Furlan2022.fr, assure qu'il a eu jusqu'ici « une vie très riche en évé­ne­ments de tous types » a bos­sé son pro­jet, qui repose sur une inno­vante « nou­velle mon­naie natio­nale numé­rique ». C'est avec elle que Philippe comp­tait finan­cer l'État et les ser­vices publics afin de nous libé­rer de l'impôt : « Grâce au numé­rique, on n'a pas besoin de planche à billet, on peut géné­rer autant d’argent qu’on veut à par­tir de rien, ce qui va nous per­mettre d’avoir le pou­voir de modi­fier notre tis­su éco­no­mique, éco­lo­gique et social à un niveau époustouflant. » 

Une planche à billets vir­tuelle pour résoudre le pro­blème de bud­get du pays, c'est, en effet, vrai­ment « époustouflant ».

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