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©Causette

Témoignages à la mani­fes­ta­tion pari­sienne du 8 mars : pour­quoi elles et ils ont bat­tu le pavé cette année

En cette Journée inter­na­tio­nale des droits des femmes, Causette s’est glis­sée dans le cor­tège pari­sien où, au len­de­main de la sep­tième jour­née de mobi­li­sa­tion contre la réforme des retraites, la lutte ne fai­blit pas. 

Manif plu­vieuse, manif heu­reuse. Alors que tombe sur Paris la pluie tant atten­due – après plus de qua­rante jours sans pré­ci­pi­ta­tions ! – des mil­liers de per­sonnes se sont ras­sem­blées place de la République (11e arron­dis­se­ment), ce mer­cre­di, à l’occasion de la Journée inter­na­tio­nale des droits des femmes. En ce 8 mars, plus que jamais, le mot d’ordre était « grève fémi­niste », dans la conti­nui­té de la grève géné­rale contre la réforme des retraite orga­ni­sée la veille dans deux cent villes en France. 

Réforme des retraites mais aus­si lutte contre les vio­lences faites aux femmes, sou­tien aux Iraniennes, aux Ukrainiennes, aux Kurdes et aux Afghanes… la marche orga­ni­sée par une dizaine d’associations fémi­nistes a ras­sem­blé plu­sieurs com­bats dans une conver­gence des luttes joyeuse, à l’unisson et en chan­sons. Causette s’est glis­sée dans le cor­tège qui s’est élan­cé depuis la place de la République jusqu’à celle de la Nation dans le 11e arrondissement. 

Aurélia, biblio­thé­caire de la ville de Paris 
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Aurélia. ©Causette

« Je suis là à la fois pour lut­ter pour les droits des femmes et contre la réforme des retraites, qui est une régres­sion pour nous. Hier, on mani­fes­tait dans le cor­tège de la Ville de Paris, et aujourd’hui, on est pré­sente avec le col­lec­tif fémi­niste des agentes de la muni­ci­pa­li­té. Et on est en force ! Nous, on ne veut pas de la décote de la retraite, on est contre l’âge de départ à 64 ans. Ce qu’on veut, c’est la retraite à 60 ans. On vou­drait aus­si qu’il y ait une réflexion sur tout ce qui peut aider les femmes à obte­nir une éga­li­té sala­riale, une vraie car­rière et la recon­nais­sance de la péni­bi­li­té des métiers extrê­me­ment fémi­ni­sés, comme ceux de la petite enfance ou du soin. »

Lire aus­si I Dans la mani­fes­ta­tion pari­sienne contre la réforme des retraites : « Les femmes ne sont pas des dindes, la farce amère ne pas­se­ra pas »

Mélodie, 27 ans, membre de l’association Neda d’Iran qui lutte contre le régime isla­mique en Iran

« Je suis ici avec des Iraniens et des Iraniennes pour faire avan­cer les droits des femmes en Iran. Je veux visi­bi­li­ser le com­bat des femmes ira­niennes, je pense qu’un 8 mars cette année sans par­ler des Iraniennes, des Afghanes et des Kurdes, parce qu’on est toutes ensemble, ça n’aurait aucun sens. Je suis là aus­si pour aler­ter sur le dan­ger que courent les éco­lières empoi­son­nées au gaz dans des écoles de filles en Iran [En trois mois, plus d’un mil­lier de jeunes filles ont été empoi­son­nées par un mys­té­rieux gaz dans plus de cin­quante écoles en Iran, ndlr]. En Iran, les femmes vivent un appar­theid de genre, elles sont sépa­rées dans tous les espaces. Dans la loi, il est écrit qu’elles valent la moi­tié d’un homme, et cela se retrans­crit dans leur quo­ti­dien. Mais mal­gré cette socié­té patriar­cale, les Iraniennes se battent, elles n’ont jamais été sou­mises, elles sont prêtes à mou­rir pour leur liber­té. Donc c’est logique qu’on soit là pour por­ter leur voix. » 

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Mélodie en jaune. ©Causette
Dilda1, 32 ans, membre du Mouvement des femmes kurdes en France 

« Nous repré­sen­tons le mou­ve­ment des femmes kurdes. Nous dédions la marche d’aujourd’hui à notre cama­rade Emine Kara, assas­si­née en décembre à Paris. Cette cama­rade était pion­nière de la lutte des femmes kurdes. Elle a tenu les armes contre Daesh. Elle repré­sente la lutte des femmes kurdes en France mais la France n’a pas su la pro­té­ger. Nous la dédions aus­si à nos trois cama­rades assas­si­nées à Paris il y a dix ans. Bien évi­dem­ment, nous sommes éga­le­ment là pour repré­sen­ter toutes les femmes du monde entier. Les mères, les filles, les sœurs, les ouvrières, les tra­vailleuses, toutes les femmes. Et sur­tout, nous ne sommes pas là pour récla­mer des droits mais pour rap­pe­ler que nous avons des droits, que nous les pre­nons et que nous ne lâche­rons pas. »

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Dilda. ©Causette

Lire aus­si I Qui était Emine Kara, la mili­tante kurde assas­si­née le 23 décembre rue d’Enghien ?

Lila Djellali, adjointe EELV à la mai­rie du 20e arron­dis­se­ment de Paris en charge de l'économie sociale et soli­daire (ESS) et de l'alimentation durable 
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Lila Djellali. ©Causette

« Je viens chaque année, mais cette année, c’est encore plus impor­tant pour moi. Hier, pour la pre­mière fois avec la mai­rie du ving­tième, on a réus­si à obte­nir plu­sieurs appar­te­ments finan­cés par la Ville pour des Afghanes exfil­trées de leur pays en 2021. Grâce à ça, on va pou­voir mon­ter un beau pro­jet d’intégration par le loge­ment. C’est un pro­jet tout nou­veau à Paris qui abou­tit dans le 20e et pour lequel je me suis extrê­me­ment bat­tue. Actuellement, ces femmes sont en train d’intégrer petit à petit ces appar­te­ments. Et grâce à l’organisation huma­ni­taire L’Armée du Salut, on va pou­voir les accom­pa­gner socia­le­ment, soit pour leur trou­ver un emploi, soit pour qu'elles prennent des cours de langue ou encore qu'elles puissent conti­nuer leurs études. »

Hugo, 23 ans, étu­diant en 5eme année de médecine 

« On est là pour repré­sen­ter le sou­tien d’une par­tie du corps étu­diant et soi­gnant aux vic­times des vio­lences obs­té­tri­cales et gyné­co­lo­giques, et notam­ment les vic­times du pro­fes­seur et gyné­co­logue Émile Daraï [L'homme a été mis en exa­men en novembre après les plaintes de 36 patientes pour viols et vio­lences, ndlr]. Il est accu­sé d’un cer­tain nombre de vio­lences obs­té­tri­cales et gyné­co­lo­giques mais il va pou­voir reprendre ses consul­ta­tions pri­vées de gyné­co­lo­gie à l'hôpital Tenon comme si de rien n’était. C’est invrai­sem­blable. Donc on est là, nous, futurs méde­cins et gyné­co­logues, pour mon­trer qu’il y a une nou­velle géné­ra­tion pour qui ces causes sont de plus en plus impor­tantes. On est là aus­si pour sou­te­nir les patientes cou­ra­geuses qui ont osé dénon­cer ces vio­lences, qui ont eu la force de por­ter plainte. »

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Hugo à gauche. ©Causette

Lire aus­si I Hôpital Tenon à Paris : le gyné­co­logue Émile Daraï peut reprendre ses consul­ta­tions privées

Lou, 17 ans, étudiante
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Pancarte de Lou. ©Causette

« J’ai vou­lu mar­quer le nombre de fémi­ni­cides sur ma pan­carte parce que je trouve ça cho­quant : on est seule­ment le 8 mars, 2023 vient à peine de com­men­cer et pour­tant, vingt-​six femmes sont déjà décé­dées sous les coups des hommes. Je vou­drais vrai­ment que ça cesse, ça fait des années qu’on le répète mais rien ne change quand on fait les comptes à la fin de l’année. J’ai l’impression que rien ne bouge, ni dans les com­mis­sa­riats où les femmes portent plainte en vain, ni dans les esprits. Je vois peu de consi­dé­ra­tions pour les femmes vic­times de vio­lences. Et moi, je pense qu’il fau­drait que quelque chose se passe pour en finir enfin. C'est pour ça que je suis là aujourd’hui. »

Lire aus­si I Féminicides : elles avaient por­té plainte, les forces de l'ordre ne les ont pas protégées

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Vincent et Adèle. ©Causette
Vincent, 43 ans et Adèle 8 ans

« J’ai fait cette pan­carte pour ma fille Adèle parce que je pense que c’est impor­tant de dire aux petites filles qu’elles sont libres de faire ce qu’elles veulent, de deve­nir qui elles veulent et de se libé­rer des car­cans et des injonc­tions. Et puis sur­tout, ça lui cor­res­pond bien car Adèle ne se retrouve pas du tout dans les contes de fées tra­di­tion­nels. Elle n’est pas très fan des prin­cesses qui res­tent là à attendre le prince char­mant. Elle, ce qui l’intéresse c’est vrai­ment de par­tir à l’aventure. »

La mani­fes­ta­tion en pho­tos (Cliquez sur les images pour les aggrandir) 

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