Longtemps caricaturés et accusés de précipiter les jeunes femmes dans l’anorexie, les réseaux sociaux présentent pourtant aujourd’hui un autre visage. Des communautés d’entraide entre jeunes femmes anorexiques s’y organisent, dans un contexte de libération de la parole autour des troubles alimentaires. Plongée dans la communauté « pro-recovery ».

« Mon compte Insta, c’est ma thérapie », annonce d’emblée Aurélie. Dans l’un de ses tout derniers posts, cette belle jeune femme de 25 ans au sourire radieux, qui « aurait voulu être mannequin, même si c’est un peu prétentieux de le dire », croque avec gourmandise dans une tartine au chocolat. « Bravo ! » applaudit l’une. « Quelle belle revanche sur la vie ! » se réjouit une autre, dans la section commentaires. Sur une photo prise quelques semaines avant, Aurélie arbore le même sourire. Mais aussi une fine sonde nasogastrique. En avril dernier, après six années d’anorexie et de boulimie, elle a frôlé la mort. Elle est depuis hospitalisée dans une clinique spécialisée.
En août 2019, elle a décidé d’ouvrir son compte Instagram @combatpourlavie, dédié à sa lutte contre la maladie. Son premier post : un appétissant croissant entamé. « J’ai créé ce compte pour vous partager ma guérison, mes réussites et mes échecs. Je viens chercher du soutien et vous épauler dans ce long chemin […] Aujourd’hui, c’est à vos côtés que je vais me battre », écrit-elle au-dessous du cliché. Depuis, elle publie en story ou dans son feed ses repas, ses hauts, ses bas, ses craintes et ses doutes. Et reçoit en échange soutien et encouragements d’autres personnes en proie à l’anorexie.
De « pro-ana » à « pro-recovery »
Il y a quelques années, les réseaux sociaux étaient surtout associés à la tyrannie des corps parfaits et aux fameux comptes « pro-ana », censés faire l’apologie de l’extrême maigreur. Si ce côté sombre des réseaux n’a pas disparu, loin de là – une rapide recherche avec le #anorexia sur Instagram suffit à s’en convaincre –, les communautés d’entraide s’y développent également depuis plusieurs années. Partages des difficultés face à la nourriture, aux hospitalisations, échanges de messages motivationnels… les personnes anorexiques, très majoritairement des jeunes femmes, s’y épaulent.
« Pour certains[…]