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© Besse

Témoignages : les vic­times indi­rectes du 13 novembre prennent la parole

Les vic­times par rico­chet – les parents, conjoint·es, enfants, frères ou sœurs de rescapé·es du 13 novembre – souffrent par­fois de graves trau­mas. De même que certain·es voisin·es des lieux où se sont pro­duites les attaques. Si aucun de leurs proches n’est décé­dé, le sta­tut de vic­time ne leur est pour­tant pas auto­ma­ti­que­ment recon­nu. Causette leur a deman­dé de racon­ter leur réa­li­té. Témoignages long format.

Iris, 22 ans, Hauts-de-France 

« J’étais au lycée. J’avais 16 ans. Mes parents sont des fans de rock’n’roll. Comme on est à Lille et que ce n’est qu’à deux heures de Paris, c’est très habi­tuel qu’ils prennent la voi­ture pour aller y voir un concert et qu’ils reviennent au milieu de la nuit. Le 13 novembre, je ne savais pas trop où ils étaient. J’avais orga­ni­sé un petit truc chez moi avec des copains. Tout se pas­sait très bien jusqu’à ce que je reçoive un appel de mon amie Léa qui m’a appris qu’ils étaient au Bataclan. Nos parents y étaient ensemble. Elle m’a dit : “Iris, je suis en panique, mon père m’a appe­lé, m’a dit qu’il m’aimait et a rac­cro­ché.” Mes amis m’ont annon­cé que les médias par­laient de fusillade. J’ai allu­mé la télé. Je suis tom­bée sur BFM, que je ne regarde plus aujourd’hui. Je lisais aus­si sur les réseaux sociaux qu’il y avait eu deux gros “boum” au Stade de France. Je ne com­pre­nais rien. Pendant six heures, je me suis crue orphe­line. Plus tard, j’ai appris que mes parents étaient sur le bal­con, là où la prise d’otages a eu lieu. Une par­tie des gens s’est éva­dée par le toit en fai­sant une échelle humaine. Mes parents font par­tie de ces per­sonnes qui ont pu se cacher dans un appar­te­ment.
Pendant deux ans, je pen­sais “je n’ai pas le droit de me plaindre de quoi que ce soit, car je n’y étais pas”. Mon état post-​traumatique m’a frap­pée bien après. Je n’ai eu les pre­miers symp­tômes qu’en 2017. C’était crise d’angoisse sur crise d’angoisse. Parfois, je ne pou­vais plus bou­ger. Toute situa­tion stres­sante devient un cau­che­mar, car ton cer­veau ne fait plus la dif­fé­rence entre stress et angoisse. Quand je suis en voyage loin de ma famille, c’est comme si je revi­vais les six heures que j’ai tra­ver­sées ce soir-​là. En 2019, j’ai confié à ma mère que c’était deve­nu impos­sible pour moi de sor­tir de la mai­son. Elle ne com­pre­nait pas. Elle disait : “Quand tu ne vas pas bien, tu mets tes pro­blèmes de côté et tu te lèves.” C’était sa manière de gérer. Ma bouée de secours a été mon père, car on a eu un peu les mêmes symp­tômes. Maintenant, ma mère com­prend.
Je n’aime pas me[…]

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