Sans eux, sans elles, le pays se serait arrêté de tourner. Pourtant, la crise sanitaire n’a donné lieu à aucun grand baroud d’honneur envers les routiers et les routières. Au contraire, elle a révélé avec éclat le mépris de la société envers cette profession plus mal aimée que jamais. Un métier dévalué, où les femmes, invisibles parmi les invisibles, se sont peu à peu taillé une place, à force de volonté et de passion.

Filmé depuis la cabine de son camion, son coup de gueule a fait le tour de France. « On roule parce qu’il faut nourrir les Français et transporter les marchandises qui vont avec. Mais à côté de ça, nous, nous sommes la dernière roue : vous n’avez pas le droit d’aller aux toilettes, vous n’avez pas le droit de vous laver, vous n’avez pas le droit de manger… Quand vous vous arrêtez sur les aires, vous ne pouvez même pas vous acheter quelque chose parce que c’est fermé, et on n’a surtout pas le droit de vous servir. Alors, respectez-nous, sinon on va tous s’arrêter ! » promettait Annick, dans une vidéo diffusée sur Facebook, puis reprise par BFMTV. C’était le 20 mars, et la crise sanitaire venait d’éclater. Les conducteurs et conductrices de poids lourds – qui assurent 89 % du transport de marchandises dans l’Hexagone – se retrouvent alors en « seconde ligne », selon la formule consacrée.
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Magasins dévalisés, services hospitaliers en tension, demande accrue de produits sanitaires : si le pays est en « guerre », comme l’affirme le président Macron, ce sont bien les routiers et les routières qui ravitaillent le front et les bases arrière. Avec la bénédiction du gouvernement, qui adopte plusieurs arrêtés, dès le 20 mars, pour lever l’interdiction de circuler le dimanche ou autoriser l’augmentation du temps de travail journalier et hebdomadaire (jusqu’à soixante heures de conduite par semaine) dans ce secteur « indispensable à la continuité de la vie de la nation ». Un secteur où près de 60 % des[…]