De ses 15 à 19 ans, Laurie Moucheron a fait la manche sur les trottoirs parisiens et vendu son corps à quelques mètres du périphérique pour se procurer quelques galettes de crack. L’ancienne toxicomane raconte aujourd’hui son combat et ses années d’errance dans le livre Laurie et la colline aux mirages, paru le 17 février.

Avec sa chevelure blond platine, ses grands yeux bleus soulignés de mascara, son large sourire et son langage soutenu, difficile d’imaginer qu’à seulement 21 ans Laurie Moucheron est une survivante de la drogue. Que derrière l’énergie qui se dégage de cette jeune femme joyeuse, mère de deux enfants, se cache de longues années d’errance.
Laurie est une rescapée de « la colline du crack », cette enclave à ciel ouvert de la porte d’Aubervilliers, coincée entre le boulevard périphérique nord parisien et la bretelle d'accès à l'autoroute du Nord. Un campement de fortune maintes fois démantelé, maintes fois reconstruit où se mêlent dealeur·euses et consommateur·rices de crack. Pendant quatre ans, Laurie Moucheron a plongé dans les abîmes de cette drogue dure hautement addictive, dérivé fumable bas de gamme de la cocaïne. Un quotidien fait de prostitution et de violences, rythmé par l’unique obsession de se procurer plusieurs « cailloux » de crack par jour.
Aujourd’hui, Laurie n’a plus rien d’une toxicomane. Plus rien de la jeune fille décharnée au visage pâle, aux cheveux noir corbeau et aux jambes couvertes de bleus, aperçue dans le documentaire du média Brut diffusé en janvier 2020, justement consacré à la consommation de crack. Les traces de ce qu’elle a vécu sont consignées dans sa mémoire et ses écrits. Passionnée d’écriture et de dessin depuis l’enfance, elle a noirci des dizaines de carnets lorsqu’elle vivait à la colline. Elle y a déposé les effets dévastateurs de la drogue, les passes sur le périphérique, mais aussi l’humanité qui ressortait parfois de cette famille d’infortune. Comme un point final à ce chapitre douloureux, Laurie Moucheron couche aujourd’hui son histoire dans un livre, Laurie et la colline aux mirages – coécrit avec la journaliste Adeline Fleury –, paru le 17 février aux éditions Michel Lafon.
Enfance douloureuse
La vie de Laurie Moucheron n’a bien sûr pas démarré sur la colline parisienne, mais en Belgique, à une cinquantaine de kilomètres de Bruxelles, dans une famille éclatée dès sa naissance par le divorce de ses parents. De ses 2 ans à 7 ans et demi, un week-end sur deux, la petite fille est abusée puis violée par son père. « Ces peines et ces douleurs ont été difficiles à écrire. C’est parfois dur, mine de rien, de raconter, raconte Laurie, la voix empreinte d’émotion. Il y avait notamment un souvenir que je pensais avoir effacé de ma mémoire : la première fois que mon père m’a touchée. Je me souviens maintenant que j’avais 2 ans, je portais des couches Pampers avec des princesses. Je me souviens de l’endroit. Je me[…]