Shaïna Hansye a été assassinée à Creil en 2019. En 2017, elle avait été victime d'un viol collectif, commis par quatre hommes, mineurs au moment des faits et jugés début février. À la veille du délibéré, Causette retrace la vie de cette adolescente solaire et tellement aimée.
Depuis quelques temps, il y a un perroquet dans la petite maison des parents de Shaïna Hansye. Il appartient à son grand-frère Yasin et s’appelle Bella, mais l’animal n’a jamais très bien compris. Elle passe son temps à héler Yasin en répétant « Bella » quand le jeune homme de 24 ans, grand et fin, visage doux derrière la barbe, passe devant la cage. Et cela fait sourire tout le monde. La famille aime la présence de Bella parce qu’elle fait du bruit, piaillant et secouant ses plumes dans un vacarme régulier. L’aimable perroquet rompt ainsi le lourd silence que Shaïna a laissé derrière elle. « Shaïna était bruyante et prenait de la place, en fait, on n’entendait qu’elle, contrairement à son frère, moins expansif, sourit sa mère Parveen. C’était des "boums boums boums" lorsqu’elle descendait les escaliers, des “Papa, tu veux un café ?” sans cesse répétés pour le plaisir de servir son père. C’était elle qui égayait la maison. »
Shaïna Hansye, 15 ans, a été assassinée le 25 octobre 2019 dans le cabanon désaffecté d’un jardin ouvrier du quartier du Plateau de Creil, à 500 mètres de chez elle. Le sordide destin de cette jeune fille au visage lumineux et aux grands yeux noirs a longuement été raconté dans Le Monde en septembre. Le coupable présumé, Driss*, 17 ans au moment des faits, a été le petit ami fugace de l’adolescente. Ils s’étaient rencontrés deux mois auparavant via les réseaux sociaux. Selon les éléments de l’enquête, le mis en examen n’aurait pas supporté que Shaïna lui annonce qu’elle était enceinte et le désigne comme père. Il lui aurait donné rendez-vous dans ce refuge pour rencontres clandestines entre jeunes du quartier et parmi les carcasses d’électroménager et cadavres de bouteilles qui jonchaient le cabanon, aurait asséné des coups de couteau dans le ventre de Shaïna avant de mettre le feu à son corps.
Victime d'un viol collectif en 2017
Deux ans avant cette odieuse mort, Shaïna avait été victime d’un viol collectif par quatre autres mineurs, dont, là encore, un garçon qu’elle fréquentait, Ahmed*. Les faits survenus le 31 août 2017 dans une polyclinique désaffectée du Plateau ont finalement été requalifiés en agression sexuelle, « probablement par manque de preuve puisque Shaïna n’est plus là pour témoigner », explique l’avocate de la famille, Me Negar Haeri. Durant le procès qui s’est tenu au tribunal des mineurs de Senlis début février 2022, une vidéo de l’agression, la même qui avait été partagée dans la foulée aux amis du quartier comme un fait d’armes, a été diffusée à l’audience. « On y voit ma fille déshabillée, sans jeans ni t‑shirt, tenter de se protéger de la caméra et du regard de ses agresseurs avec sa main avant de se prendre un coup de pied », souffle le père,[…]