Carrières morcelées, salaires inférieurs, séparations, les pensions des femmes sont plus faibles que celles des hommes. Alors que la réforme des retraites est entrée en vigueur ce 1er septembre, Causette est allée à la rencontre de retraitées précaires, qui se débrouillent pour s’en sortir.
Dans son petit appartement niché dans le village médiéval de Lautrec, dans le Tarn, Marie-Brigitte Le Ralle, 71 ans, passe de nombreuses heures les yeux rivés sur son compte en banque. Assise dans son salon, elle compte et recompte. « Je calcule absolument toutes mes sorties d’argent, confie-t-elle avec pudeur. Je fais tout pour ne pas me retrouver à découvert, mais c’est très difficile. Plus ça va et moins je m’en sors, car tout augmente. » Avec seulement 700 euros de pension mensuelle, Marie-Brigitte ne peut plus faire face. Il y a quelques mois, son four l’a lâchée. Impossible d’en racheter un autre. « J’attends le versement trimestriel de ma retraite complémentaire pour le remplacer par un modèle miniature, détaille-t-elle. Mais je ne suis pas sûre que cet argent – 350 euros environ – suffise, car il me sert aussi à payer les frais de révision de ma voiture, mes factures d’eau et celles d’électricité. » Le nouveau four attendra sans doute. Tout comme le renouvellement de ses lunettes, qui ne sont plus à sa vue depuis longtemps, mais qu’elle ne peut changer de peur d’avoir à avancer les frais. « Depuis avril dernier, j’ai droit à des paniers-repas du Secours populaire, poursuit la Tarnaise. J’ai mis des mois à ne pas pleurer en y allant. C’était impossible de ne pas m’effondrer. J’avais l’impression de ne plus avoir la moindre dignité. » Marie-Brigitte vit sa retraite, prise en 2011, comme un déclassement social. Celle qui a été tour à tour comédienne, intérimaire, formatrice et enfin responsable de chambre d’hôtes tout en[…]