La jeunesse se mobilise sur le front du climat, mais pas que. Lutte contre les armes à feu (États-Unis), contre la misère (France) ou encore contre les mutilations génitales et mariages forcés (Guinée) : la relève est là et compte bien se faire entendre de ses aîné·es.
États-Unis : Ils luttent contre les armes à feu
Dix-sept de leurs camarades y ont laissé la vie. Après la fusillade de Parkland (Floride), le 14 février 2018, Emma Gonzales (18 ans), David Hogg (17 ans), Ryan Deitsch (18 ans) et une vingtaine de lycéen·nes ont lancé le comité d’action politique #NeverAgain (« Plus jamais ça »). Manifestations locales et nationales, lobbying politique, appels au boycott des entreprises finançant la National Rifle Association (organisation proarmes très puissante aux États-Unis)…, depuis plus d’un an, ils tentent de faire durcir les conditions d’accès aux armes à feu. C’est aussi l’un des combats de Naomi Wadler, aujourd’hui âgée de 12 ans, qui a fait grève le 14 mars 2018 pour protester contre la violence dans les écoles. Dénonçant la double peine qui touche les Afro-Américaines – victimes des armes à feu, mais dans l’indifférence générale –, la jeune fille est devenue l’une des figures de la Marche pour nos vies, organisée en mars 2018. Et continue de se battre pour faire entendre la voix des filles noires.
Colombie : Ils portent plainte contre la déforestation de l’Amazonie
Le plus jeune avait 7 ans, le plus âgé, 26. Le 29 janvier 2018, vingt-cinq enfants et adolescent·es ont porté plainte contre l’État colombien, avec le soutien de l’ONG Dejusticia. Leur grief ? Ils et elles estiment que « la déforestation généralisée en Amazonie et le changement climatique menacent [leurs] droits » fondamentaux à la vie et à un environnement sain. Et la justice leur a donné raison : trois mois plus tard, la Cour suprême de Colombie a ordonné au gouvernement de lutter contre la déforestation massive au nom des générations futures. Sommé d’élaborer rapidement un programme d’action, le gouvernement a présenté, en février dernier, un Plan national de développement 2018–2022, dont l’objectif n’est pas de réduire, mais de maintenir le nombre d’hectares déboisés au niveau actuel – 2 200 km² en 2017, soit l’équivalent du Luxembourg. Loin de se laisser berner, les vingt-cinq jeunes activistes, soutenu·es par des expert·es et des associations, ont donc remis le couvert : le 5 mars, ils et elles ont adressé une lettre au Parlement en demandant que de nouveaux objectifs soient fixés. Reste à savoir s’ils seront entendus.
Australie : Elle boycotte l’hymne national
Elle a refusé de se lever pour chanter. Début septembre 2018, Harper Nielsen, une Australienne de 9 ans, est restée muette alors que ses camarades entonnaient l’hymne national : « […] Nous sommes jeunes et libres. […] Avance la belle et juste Australie ». Des paroles écrites en pleine période coloniale (1878) qui, selon elle, ont une dimension raciste*. « “Avancez les Blancs”, c’est ce qu’il voulait dire quand il a été écrit. C’est irrespectueux pour les Aborigènes qui étaient là avant nous », a‑t-elle expliqué au média 9News. Une rébellion qui lui a valu une heure de colle et, surtout, une polémique nationale – la leader d’extrême droite Pauline Hanson l’a notamment traitée de « sale gosse ». C’est qu’en Australie, où les discriminations envers les Aborigènes sont régulièrement dénoncées, le sujet est brûlant : ces dernières années, plusieurs personnalités comme le sportif Joe Williams ou la chanteuse d’opéra Deborah Cheetham ont, comme Harper, boycotté l’hymne.
* En anglais, le terme fair peut signifier « juste », mais aussi « clair ».
Inde : Face au changement climatique, elle attaque l’État
Elle avait 5 ans, en juin 2013, quand des pluies diluviennes se sont abattues sur l’État de l’Uttarakhand (Inde), tuant plus de 5 700 personnes. Quatre ans plus tard, la petite Ridhima Pandey a décidé d’agir. En mars 2017, du haut de ses 9 ans, elle a attaqué le gouvernement indien devant le Tribunal national vert, créé en 2010 pour traiter les litiges environnementaux. Dans un dossier de cinquante-deux pages, elle accuse le gouvernement de n’avoir « pris aucune mesure efficace et scientifiquement fondée » pour lutter contre le changement climatique, pointe « l’énorme fossé » entre les engagements officiels et « la mise en œuvre des législations environnementales », et demande au tribunal d’enjoindre les autorités à agir. Tribunal qui a rendu sa décision le 15 janvier dernier… et a rejeté sa demande, estimant qu’il n’y a « aucune raison de présumer que l’accord de Paris et d’autres protocoles environnementaux » ne sont pas pris en compte dans les politiques gouvernementales.
Guinée : Super héroïne justicière
En 2016, Hadja Idrissa Bah, qui a 16 ans, préside le Parlement des enfants de Guinée*, expérience qui lui donne le goût de l’engagement féministe. Sollicitée par des jeunes filles qui voulaient aussi s’engager, Hadja décide de créer le Club des jeunes filles leaders de Guinée.
D’un « espace de parole pour les filles sur des sujets comme la sexualité », explique-t-elle, le club, qui compte aujourd’hui deux cents membres, devient vite un outil d’intervention directe particulièrement badass. « On nous a demandé de l’aide sur des cas de mariages d’enfants, de viols ou de mutilations génitales. Nous intervenons auprès des policiers pour qu’ils arrêtent les présumés coupables, et ça exige de les suivre chez les suspects pour éviter les tentatives de corruption… » Le Club a empêché dix-sept mariages d’enfants en 2018 et est déjà intervenu sur huit cas de viol en 2019.
*Une initiative du gouvernement pour sensibiliser les enfants à la citoyenneté.
France : Torpilleur de misère
Voilà un petit garçon inspirant. Arthur Soufflet a 9 ans, habite à Cambrai (Nord) et vend, depuis quatre ans, ses toiles très colorées pour venir en aide aux sans-abri. « Quand même, c’est triste, nous, on est tous debout, on a une maison, et là, il y a une personne au milieu de la rue, elle est triste, elle n’a pas de maison, observe Arthur au micro de France Info Junior. J’étais triste et j’ai commencé à les aider. »
Lancé seul dans l’aventure, mais avec le soutien de ses parents, le garçon, aujourd’hui connu dans toute la France, a déjà récolté plusieurs milliers d’euros, qu’il transforme en sandwichs pour les sans-abri de sa ville… ou qu’il économise : il a déjà « 1 527 euros » de côté pour, à terme, « acheter un immeuble » et y loger les personnes qu’il aide au quotidien.
États−Unis : La jeunesse à la rescousse des aînés
Du haut de ses 14 ans, Emma Yang doit déjà vivre avec le qualificatif de génie sur ses épaules. Cette ado née à Hongkong et résidant aux États-Unis a été repérée et primée dès ses 10 ans par diverses institutions promouvant les talents de nos chères têtes blondes en matière de nouvelles technologies. En ce moment, elle développe une application dont elle a eu l’idée en observant sa grand-mère atteinte d’Alzheimer, qui ne la reconnaissait plus. Timeless permettra aux malades de savoir à qui ils s’adressent grâce à un logiciel de reconnaissance faciale qui fera coïncider les visages des interlocuteurs et interlocutrices avec un stock de photos des proches ou des accompagnant·es. De quoi révolutionner leur quotidien.