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« Seul un oui est un oui » : les député·es espagnol·es ins­crivent « le consen­te­ment sexuel expli­cite » dans la loi

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© Daniel Prado

En Espagne, les député·es ont voté, jeu­di 26 mai, en faveur d’un texte pour dur­cir la loi contre le viol, en y intro­dui­sant la notion de consen­te­ment sexuel expli­cite. Grande pro­messe du gou­ver­ne­ment de gauche, cette mesure place l’Espagne en avance sur ses voi­sins européens.

C’est une vic­toire his­to­rique. « Solo si es si » (seul un oui est un oui), le man­tra espa­gnol défen­du depuis 2018 en Espagne par des asso­cia­tions fémi­nistes, a enfin été gra­vé dans le marbre. Les député·es de la pénin­sule ibé­rique ont voté le jeu­di 26 mai l’introduction du « consen­te­ment sexuel expli­cite » dans le Code Pénal. Un texte déjà adop­té en Conseil des ministres au prin­temps 2020, qui per­met de soli­di­fier la loi contre le viol en consi­dé­rant tout acte sexuel non consen­ti de manière claire et libre comme un viol, et non plus comme un abus sexuel. Cela signi­fie que la notion de contrainte n’aura pas à être prou­vée, comme c’est actuel­le­ment le cas en France. Ce pro­jet de loi « Solo si es si » com­prend éga­le­ment l’interdiction de la publi­ci­té pro­mot­tant la por­no­gra­phie et la créa­tion d'un délit de har­cè­le­ment de rue. 

La ministre de l’Egalité, Irene Montero, a salué l’introduction de la mesure sur son compte Twitter : « Aujourd’hui est un grand jour pour toutes les femmes. L’Assemblée a approu­vé avec une large majo­ri­té la loi "Seul un oui est un oui". Nous le devions à toutes les vic­times de vio­lences sexuelles et nous lais­sons ain­si un meilleur pré­sent et ave­nir à nos filles, sœurs et amies. »

Le texte a en effet été voté par une large majo­ri­té : 201 votes pour, 140 contre – prin­ci­pa­le­ment des dépu­tés de Vox (extrême droite) et du Parti popu­laire (droite) – et trois abs­ten­tions. Il doit désor­mais être approu­vé par le Sénat avant d’être adopté. 

Un vrai tour­nant dans la loi espagnole

C’est une grande pro­messe du gou­ver­ne­ment de coa­li­tion de gauche pour lut­ter contre les vio­lences sexuelles qui a été actée. En plus d’effacer la dis­tinc­tion entre abus sexuel et agres­sion sexuelle, cette mesure entraîne un chan­ge­ment de para­digme total des vio­lences sexuelles. Désormais, on ne s'intéresse plus à la façon dont les femmes réagissent ou résistent à l'agression, mais bien à leur volon­té, comme le sou­ligne le quo­ti­dien espa­gnol El Pais. La porte-​parole du gou­ver­ne­ment María Jesús Montero, l’expliquait lors de la pré­sen­ta­tion du texte en Conseil des ministres en juillet 2021 : le but est de rendre « clair le fait que le silence ou la pas­si­vi­té ne signi­fient pas consen­te­ment. » 

Irene Montero a éga­le­ment rap­pe­lé que cette loi est « un pas déci­sif pour chan­ger la culture sexuelle de notre pays. Une culture éloi­gnée de la honte, de la faute et de la peur. » En intro­dui­sant cette loi, elle sou­haite « créer une culture du consen­te­ment ». Avec fougue, la ministre a assu­ré devant les député·es que le gou­ver­ne­ment de gauche ferait tout pour « étendre et conso­li­der les droits des femmes, pour construire une nou­velle géné­ra­tion de droits qui rompe avec les racines de l’inégalité et du patriarcat. »

Une affaire de viol à l’origine du dur­cis­se­ment de la loi

Le moteur de cette mesure remonte à 2018. Le sou­hait d’introduire la notion de « consen­te­ment sexuel expli­cite » dans la loi fait en effet écho à l’affaire dite de « La Meute ». Cinq hommes avaient été condam­nés à neuf ans de pri­son en 2018 pour « abus sexuels », et non pour viol en réunion, sur une jeune femme de 18 ans qui avait été agres­sée lors des fêtes de Pampelune en 2016. Le ver­dict avait entraî­né des vagues de mani­fes­ta­tions dans tout le pays et pro­vo­qué la colère de nombreux·ses Espagnol·es. Le tri­bu­nal suprême espa­gnol avait fina­le­ment requa­li­fié la condam­na­tion en 2019 : les cinq cou­pables avaient vu leur peine s’aggraver à 15 ans de pri­son, cette fois-​ci pour des faits de viols. 

Pour rap­pel, la notion de consen­te­ment n’est pas ins­crite dans la défi­ni­tion du viol en France. Le Code pénal consi­dère comme viol tout acte de péné­tra­tion sexuelle ou acte bucco-​génital com­mis par vio­lence, contrainte, menace ou surprise. 

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