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©A.P.

Sénégal : sur la route avec les sages-femmes

Infrastructures inexis­tantes, pénu­rie de médi­ca­ments… Dans le Tambacounda, région pauvre et encla­vée de l’est du Sénégal, l’isolement rend la mater­ni­té encore plus périlleuse qu’ailleurs. Khadidiatou Diao, sage-​femme pour l’association Le Kaïcedrat, sillonne la brousse pour appor­ter soins et contra­cep­tifs, et assu­rer le sui­vi des grossesses.

Khadidiatou Diao enfile ses gants et se penche au-​dessus de la table d’auscultation. C’est dans une petite case pous­sié­reuse faite de paille et de terre que la sage-​femme effec­tue, ce matin, ses consul­ta­tions. La porte en tôle impro­vi­sée laisse fil­trer quelques rais de lumière. Dehors, le soleil cogne déjà sur le petit vil­lage de Dimbo, per­du dans la brousse du Sénégal ­orien­tal, dont les 575 habitant·es baignent aujourd’hui dans un halo bru­meux cou­leur sépia. Le nuage de sable venu de Mauritanie s’ajoute aux condi­tions cli­ma­tiques extrêmes, typiques de la région aride de Tambacounda. 

Neuf femmes patientent autour de la salle de consul­ta­tion impro­visée, enfants dans le dos, car­net de san­té à la main. Leurs rires cha­leu­reux contrastent avec les his­toires qu’elles confient à voix basse dans la pénombre de la case. L’examen obs­té­tri­cal se fait en silence, et sans spé­cu­lum. Khadidiatou Diao se passe par­fois de mots comme de maté­riel médi­cal. « L’enfant devrait arri­ver dans quinze jours », finit-​elle par annon­cer à Taco N. La future mère esquisse un sou­rire timide que le sou­ve­nir de son cin­quième accou­che­ment empêche d’être franc. « C’était il y a quelques années. J’ai eu des contrac­tions ­sou­daines et très vio­lentes alors que je n’étais pas à terme. Tout est allé très vite. Le temps d’attacher le che­val à la char­rette, et l’enfant était déjà là. Il n’a pas sur­vé­cu. » Idéalement, pour un bon sui­vi, il aurait fal­lu, hier comme aujourd’hui, que Taco N. voyage plu­sieurs heures en char­rette sur les pistes caho­teuses, quatre fois au cours de sa gros­sesse, pour rejoindre le poste de san­té le plus proche, situé à 20 kilo­mètres de Dimbo. Un tra­jet d’autant plus éprou­vant qu’ici les tem­pé­ra­tures atteignent régu­liè­re­ment les 45 ° C. Ce par­cours semé d’embûches dis­suade les femmes enceintes de consulter. 

« À par­tir de juillet, cer­tains endroits sont inon­dés, on ne peut plus passer. »

Khadidiatou Diao, sage-​femme itinérante.

Depuis 2013, l’association séné­ga­laise Le Kaïcedrat a choi­si de déployer dans cette zone encla­vée des tour­nées de sui­vi gyné­co­lo­gique, grâce à trois sages-​femmes iti­né­rantes. Deux d’entre elles rayonnent autour de Bala, un centre doté d’une mater­ni­té à une cen­taine de kilo­mètres de la fron­tière avec le Mali. Khadidiatou Diao y a tra­vaillé avant d’être affec­tée au poste de san­té de Dawady, 150 kilo­mètres plus à l’ouest. Voilà main­te­nant trois ans qu’elle sillonne ce désert sani­taire à bord du 4 × 4 conduit par un chauf­feur mis à dis­po­si­tion par[…]

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