Monica Benicio, une veuve contre Bolsonaro

Monica Benicio n’a jamais vou­lu être sur le devant de la scène. Mais l’assassinat, à Rio, en mars 2018, de sa com­pagne, la mili­tante et élue Marielle Franco, a tout bou­le­ver­sé. Déterminée à ne pas lais­ser ce crime impu­ni et à reprendre son flam­beau, elle s’est lan­cée dans une folle quête de jus­tice. En 2020, elle sou­tien­dra les can­di­dates issues des mino­ri­tés aux élec­tions muni­ci­pales brésiliennes. 

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Monica Benicio à São Paulo (Brésil), le 3 novembre. Sur son tee-​shirt est
ins­crit « Marielle vit ! © Gabriella Portilho pour Causette

Le 14 mars 2018, la vie de Monica Benicio a bas­cu­lé. Ce soir-​là, vers 21 heures, elle attend sa com­pagne pour dîner. Elle l’a eue au télé­phone et d’ici dix minutes, elle sera ren­trée de l’une des nom­breuses réunions publiques qui ponc­tuent son agen­da. Issue des quar­tiers défa­vo­ri­sés de Rio de Janeiro, noire, les­bienne et défen­seuse des mino­ri­tés, Marielle Franco, 38 ans, élue muni­ci­pale en pleine ascen­sion, n’arrivera jamais chez elle. Des tueurs pro­fes­sion­nels méti­cu­leux mitraillent sa voi­ture, la tuant elle et son chauf­feur. « Un crime poli­tique », selon Monica Benicio, qui a ému le monde entier.

Elle parle de la « nuit du 14 mars ». Trop dur de pro­non­cer les mots « assas­si­nat » ou « meurtre ». « C’est peut-​être le début de mon pro­ces­sus de deuil que je n’ai jamais fait… » Car depuis bien­tôt deux ans, Monica, 33 ans, ne s’est jamais réel­le­ment posée. Au début, ron­gée par la culpa­bi­li­té de ne pas avoir pu pro­té­ger sa com­pagne ni la gar­der en vie, elle se prive de nour­ri­ture dans une logique d’autodestruction vio­lente. Devant l’insistance de ses proches, elle accepte de prendre des com­plé­ments ali­men­taires, « mais uni­que­ment avec de l’eau ». « Le lait, je trou­vais ça bon, et tout ce qui était bon me don­nait envie de pleu­rer et de vomir », se souvient-elle.Elle perd 14 kilos en un mois. 

Sans trop réflé­chir, elle vide la mai­son où elle habi­tait avec sa com­pagne et rem­plit une valise de 23 kilos pour par­cou­rir le monde et déli­vrer son mes­sage : « Le Brésil ne sera pas une démo­cra­tie com­plète tant que l’État n’aura pas trou­vé qui est le com­man­di­taire de l’attentat contre Marielle Franco. Ce n’est pas une ques­tion de gauche ou de droite, c’est la bar­ba­rie contre la démo­cra­tie. » Elle sur­charge son agen­da par néces­si­té, car c’est dans les moments de calme qu’elle sai­sit vrai­ment ce qui est arri­vé. « Je vis dans les aéro­ports, je n’ai plus de vie sociale, mais je le fais pour Marielle. Le sym­bole qu’elle est deve­nue doit per­du­rer. » Depuis peu, elle prend conscience qu’elle doit aus­si faire atten­tion à elle, mais elle a du mal à ralen­tir le rythme.

Prendre la relève

Malgré un envi­ron­ne­ment « extrê­me­ment hos­tile » à Rio, elle a déci­dé, il y a quatre mois, de quit­ter Brasilia, où elle s’était fixée un temps, pour poser ses valises dans un petit appar­te­ment fonc­tion­nel d’un quar­tier cen­tral de la ville. C’est là que nous la ren­con­trons. Son gol­den retrie­ver, offert par une amie à la mort de son chien l’an pas­sé, per­turbe jovia­le­ment le début de l’entretien. Elle l’a appe­lé Francisco, comme le véri­table nom de famille de sa com­pagne, Marielle[…]

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