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Beyrouth, le 29 octobre. Cela fait treize jours que les Libanais·es manifestent dans le centre-ville, au niveau de la voie Express du Ring. © Denis Meyer pour Causette

Liban : la jeu­nesse en rêve général

Chômage, cor­rup­tion, inéga­li­tés, pau­vre­té… Le 17 octobre, l’annonce d’une taxe sur les appels WhatsApp et Messenger a fait explo­ser la colère des Libanais·es, sur­tout celle de la jeune géné­ra­tion. Depuis, ils et elles dénoncent, dans la rue, un quo­ti­dien sans ave­nir, volé par la classe poli­tique au pou­voir depuis plus de trente ans. 

« Le Liban ne te don­ne­ra jamais ce que tu veux. Si tu as un rêve, de l’ambition, tu ne pour­ras pas les réa­li­ser ici. » À 27 ans, Rita jette un regard sans espoir sur son pays, comme la majo­ri­té des jeunes de sa géné­ra­tion. Originaire du sud du Liban, la jeune femme tra­vaille comme consul­tante à Beyrouth et vit en colo­ca­tion avec cinq autres per­sonnes. Avec des salaires qui tournent autour de 600 dol­lars (540 euros) men­suels, les fins de mois sont dif­fi­ciles. « J’ai fait des études, je tra­vaille dur, mais je suis face à tel­le­ment d’obstacles. Je n’ai pas d’épargne à cause des taxes et du coût de la vie. Et je ne pour­rai jamais grim­per les éche­lons grâce à mes capa­ci­tés ou à mes diplômes à cause de la was­ta. » Cette expres­sion dif­fi­ci­le­ment tra­dui­sible désigne un sys­tème de pis­ton orga­ni­sé : pour obte­nir un poste ou évo­luer, il faut être intro­duit par une connais­sance ou avoir les moyens de payer les fonc­tion­naires récal­ci­trants pour y arri­ver. « Je viens d’une famille de six enfants, j’étais dans une école pri­vée et j’ai du mal à gagner ma vie, pour­suit la jeune femme. Vous ima­gi­nez ce que mon père a dû payer ? Pourquoi ? Car les écoles publiques sont vrai­ment lamen­tables et que le gou­ver­ne­ment n’y met pas les moyens. Je veux sim­ple­ment ce que toute per­sonne qui tra­vaille mérite : aller dîner, boire un verre, sor­tir avec mes amis. »

Je fais par­tie de cette géné­ra­tion qui se bat pour essayer de conti­nuer à vivre ici. Mais pour cer­tains, ce n’est plus possible. 

Rita, consul­tante à Beyrouth 

Fatiguée de devoir vivre rési­gnée, elle fait par­tie des dizaines de mil­liers de jeunes Libanais·es à être descendu·es dans la rue dès le pre­mier jour de la révo­lu­tion, le 17 octobre. Depuis, elle a repris le tra­vail, mais retourne chaque soir mani­fes­ter. « J’aimerais construire quelque chose pour mon pays, confie-​t-​elle. Je fais par­tie de cette géné­ra­tion qui se bat pour conti­nuer à vivre ici. Mais pour cer­tains, ce n’est plus pos­sible. Par exemple, si cette révo­lu­tion n’aboutit pas ou se ter­mine mal, ma sœur émi­gre­ra aux États-​Unis. Je ne veux pas ça. »

Corruption et arran­ge­ments…
Ce soir-​là, après avoir dîné, dra­peau liba­nais sur les épaules, Rita des­cend mani­fes­ter avec des ami·es et l’une de ses colo­ca­taires, Nabila. « Je ne sais pas com­ment je vais payer mon loyer avec la révo­lu­tion, je n’ai plus du tout d’argent. En même temps, je n’avais pas plus d’argent avant la révo­lu­tion », plai­sante cette[…]

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