Écosse : jus­tice pour les sorcières !

Pendant trois siècles, l’Écosse a mul­ti­plié les exac­tions contre les per­sonnes accu­sées de sor­cel­le­rie, fai­sant plu­sieurs mil­liers de vic­times à tra­vers le pays. 85 % d’entre elles étaient des femmes. L’avocate Claire Mitchell et l’autrice Zoe Venditozzi militent aujourd’hui pour que des excuses publiques soient pré­sen­tées par l’État écos­sais à l’occasion du 8 mars.

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Claire Mitchell et Zoe Venditozzi, à l’origine de la cam­pagne
Witches of Scotland, dans le cime­tière de Dundee,
ville où fut exé­cu­tée en 1669 Grissell Jaffray,
la « der­nière sor­cière d’Écosse ». © Julien Marsault

Des nuées de tou­ristes se pressent régu­liè­re­ment dans la char­mante vieille ville ­d’Édimbourg pour moquer les vilaines sor­cières lors de démons­tra­tions théâ­trales. Durant Halloween, cha­peaux poin­tus, balais et ver­rues sont légion. Mais, der­rière cette image d’Épinal, se cache une dure réalité.

Du XVe au XVIIIe siècle, l’Écosse a mené une guerre redou­table contre la sor­cel­le­rie. En pleine panique sata­nique, plu­sieurs mil­liers de femmes en ont été accu­sées. Une grande par­tie d’entre elles se sont retrou­vées au bûcher, étran­glées devant une foule hai­neuse avant que leur corps ne finisse en cendres, pour avoir, soi-​disant, lan­cé une malé­dic­tion contre leur voi­sin ou à cause de simples rumeurs. Des exac­tions d’une ampleur unique en Europe et acti­ve­ment sou­te­nues par l’Église. Une période sombre de l’histoire écos­saise qui a duré jusqu’à la révo­ca­tion du Witchcraft Act – la loi qui punit de telles pra­tiques – en 1736.

Trois siècles plus tard, l’avocate Claire Mitchell et l’autrice Zoe Venditozzi militent pour que jus­tice soit ren­due à ces inno­centes vic­times de fémi­ni­cides. Les deux acti­vistes écos­saises sont à l’origine de la cam­pagne Witches of Scotland, lan­cée en 2020, pour que l’état gra­cie à titre post­hume les vic­times de ces atro­ci­tés. À l’instar de la Chambre des repré­sen­tants du Massachusetts, aux États-​Unis, qui a offi­ciel­le­ment réha­bi­li­té en 2001 les sor­cières de Salem, jugées lors de tra­giques pro­cès de février 1692 à mai 1693.

CAUSETTE ECOSSE SORCIERES JM 18
À Dunning (région du Perthshire) :
« Maggie Wall brû­la ici en 1657
en tant que sor­cière. »
Un fait dont aucun his­to­rien n’a trou­vé trace.
© Julien Marsault

Autre demande des acti­vistes : la créa­tion d’un mémo­rial natio­nal, comme l’a fait la Norvège, avec le Steilneset Memorial, struc­ture d’acier inau­gu­rée en 2011 à Vardø, en bord de mer. Les per­sonnes dési­reuses de se confron­ter au pas­sé de ce pays se retrouvent face à une chaise de laquelle s’échappe une flamme soli­taire, un jeu de miroirs reflé­tant les visiteur·euses comme autant de juges encer­clant le·la condamné·e.

C’est en réflé­chis­sant à la repré­sen­ta­tion de ces femmes dans les livres d’histoire, mais aus­si au sein de l’espace public, que Claire Mitchell, avo­cate renom­mée, pro­fon­dé­ment fémi­niste, a déci­dé d’agir. « Un jour, je pro­me­nais mon chien et, en regar­dant autour de moi, je me suis deman­dé pour­quoi il n’y avait pas de sta­tue, de monu­ment dédié à cela », raconte la mili­tante, ren­con­trée dans la ville de Dundee, où elle exerce. Ici, la der­nière sor­cière pré­su­mée a été exé­cu­tée en 1669. De Grissell Jaffray ne reste qu’une mosaïque colo­rée au centre de la ville, au détour d’une ruelle étroite. Ainsi que quelques infor­ma­tions sur son pas­sé, bien dif­fi­ciles à déchif­frer. Pour com­bien d’autres vic­times tom­bées dans les oubliettes du passé ?

Du pod­cast à la pétition

Si quelques traces de ces faits his­to­riques existent à tra­vers le pays, cette période reste floue pour une bonne par­tie de la popu­la­tion. C’est pour­quoi Claire et l’autrice Zoe Venditozzi, ren­con­trée lors d’un mariage, décident, en 2020, de créer un pod­cast sur le sujet et d’interpeller les auto­ri­tés. La cam­pagne Witches of Scotland est lancée.

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À Peter Street, dans le centre-​ville de Dundee, dans les[…]

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