
Pourquoi se contenter de brasser des millions en enregistrant la vie des gens ? Il y a bien plus à faire pour Mark Zuckerberg. Réunir 2,4 milliards d’individus : check. Les mettre en lien dans un espace commun : check. Mais cela revient à avoir une population et un territoire (certes, virtuels) ! Il ne manque plus qu’une monnaie et une législation pour devenir un État. En toute humilité, Mark semble décidé à relever le défi. Il a annoncé, mi-juin, la création de Libra, une monnaie virtuelle prévue pour 2020. Dans la foulée, il a confirmé, par ailleurs, la création d’un « organe indépendant dont les décisions seraient transparentes et obligatoires ». Une sorte de tribunal facebookien pour « juger les conflits de contenu », surnommé « Cour suprême ».
« Nous ne pensons pas que Facebook joue le rôle d’un État », s’est défendu Nick Clegg, le directeur des affaires publiques de Facebook, dans une interview au Monde, le 18 juin. Mais pour Georges Chatillon, professeur de droit de l’Internet à l’université Paris‑I Panthéon-Sorbonne, « ce sont deux crimes de lèse-majesté du point de vue des États démocratiques. Même le Fonds monétaire international ou la Banque centrale européenne ne peuvent pas le faire ! » Le mépris va même plus loin : « Si des États voulaient attaquer Facebook, ils devraient reconnaître qu’il s’agit bien d’une monnaie et d’une cour de justice. » Dans tous les cas, c’est donc win-win pour Zuckerberg. « Facebook dispose déjà d’un pouvoir politique plus important que n’importe quel État, mais il veut encore tout court-circuiter par le haut », ajoute Georges Chatillon. Sky is the limit.