Connaissez-vous le prix Shkreli, du nom de ce gentil financier, Martin Shkreli, qui, en 2015, racheta les droits de commercialisation exclusive du Daraprim (un médicament utilisé dans le traitement du paludisme, du VIH ou de la toxoplasmose) afin de faire passer le prix du comprimé de 13,50 dollars à 775 dollars ? Depuis 2017, le think tank spécialisé dans la santé Lown Institute décerne le prix Shkreli à des entreprises ou à des institutions médicales ayant brillé par leur cynisme ou par leur appât du gain sur le dos des malades.
Et après une année de pandémie mondiale, c’est tout naturellement une promotion spécial Covid-19 qui a eu l’honneur d’être auréolée de ce name and shame sanitaire. On y trouve en vrac : des hôpitaux qui ont sanctionné des membres de leur personnel portant le masque parce que cela « effrayait le public » ; le gouvernement fédéral américain, qui a confié la distribution de masques et de blouses à des entreprises privées, entraînant ainsi de la spéculation et du retard dans la distribution ; et… Moderna, qui a touché 1 milliard de dollars de fonds publics pour trouver un vaccin et qui l’a mis en vente à un prix bien supérieur à celui de ses concurrents – 20 euros la dose, contre une douzaine d’euros pour celui de Pfizer et seulement 2 à 3 euros pour celui d’AstraZeneca.
Stéphane Bancel, PDG français du laboratoire américain, a donné une interview à L’Express dans laquelle il assume et justifie cette recherche de rentabilité : « Il était important de générer du cash pour continuer à investir et à développer d’autres vaccins, d’autres traitements. Nous avons voulu être responsables dans notre politique de prix. Nous ne voulons pas maximiser le profit, ni le prix de vente, mais je veux rendre l’entreprise Moderna pérenne. » Pour une société créée en 2010 et qui, jusque-là, n’avait lancé aucun produit sur le marché, le Covid a tout d’une assurance-santé.