Première historique : en Argentine, début juin, un homme a été condamné à indemniser son ex-femme pour les quasi trente années passées à éduquer les enfants et à entretenir le foyer aux dépens de sa carrière. Quelques jours plus tard, les Suissesses faisaient grève avec, entre autres revendications, « la valorisation économique du travail domestique », majoritairement pris en charge par les femmes, sans rétribution ni reconnaissance. Voilà donc un thème cher aux féministes des années 1970 remis sur la table : faut-il rémunérer le travail domestique ?
Maud Simonet
Sociologue, directrice de recherche au CNRS
« Il est nécessaire de se mobiliser sur cette question, car le travail gratuit a toujours été assigné aux femmes. Dans les années 1970, le mouvement Wages for housework (“Des salaires pour le travail ménager”) a milité pour leur rémunération sous forme de salaire versé par l’État. Mais c’était moins une question d’argent qu’un objectif de reconnaissance symbolique et politique. Il s’agissait de rendre visible tout le travail pris en charge par les femmes et de dénaturaliser l’idée selon laquelle c’était une tâche “naturelle”, répondant à l’instinct maternel.
Aujourd’hui, on parle de “formation” pour légitimer les stages non rémunérés, de “citoyenneté” pour le bénévolat ou de “passion” pour les créations partagées sur Internet. Et tout ça est encore majoritairement pris en charge par les femmes, lorsqu’elles passent voir leurs aînés à l’hôpital, qu’elles font l’aide aux[…]