Voilà seize ans que la pneumologue de Brest dénonce les laboratoires pharmaceutiques Servier dans ce qui est devenu « l’affaire du Mediator ». À la veille de l’ouverture du procès en appel, le 9 janvier, la célèbre lanceuse d’alerte retourne au combat. En plus du soutien aux victimes, de l’aide aux avocat·es et de son job à l’hôpital, elle se bat pour en finir avec les conflits d’intérêts médicaux.
Elle avait rencontré Hollande, pas encore Macron. Le jour de son rendez-vous avec le président, le 27 octobre 2021, lors d’un dîner associatif, Irène Frachon lui a tendu son livre-photos Visages du Mediator *. Un recueil en noir et blanc composé de portraits de victimes ayant consommé le fameux médicament coupe-faim. On estime que 1 500 à 2 100 personnes en sont mortes en France, des suites de graves pathologies cardiaques. Sur les clichés : surtout des femmes, majoritairement en surpoids, le profil type des victimes. Sur leur torse, entre les seins, de longues cicatrices, signes d’opérations, voire de greffes du cœur. Irène Frachon a ouvert le bouquin page 15 puis l’a adressé au chef de l’État : « Voilà Claudie, monsieur le Président. Elle est morte aujourd’hui. » Ses filles venaient de lui envoyer un SMS : « Maman est partie. » Claudie, « qui a souffert le martyre, qui habitait Perpignan », raconte aujourd’hui la pneumologue et lanceuse d’alerte du Mediator, dans sa maison près de Brest. « Macron était sidéré et surpris que l’on meure encore du Mediator, se rappelle- t‑elle. Je lui ai répondu : “Oui, elle en a pris il y a dix-quinze ans.” »
L’affaire a été jugée en 2019, douze ans après qu’Irène Frachon a lancé l’alerte sur le médicament. Les laboratoires Servier, qui le commercialisaient, ont été condamnés à 2,7 millions d’euros d’amende pour « tromperie[…]