Astroféministes : les che­va­lières du zodiaque

Pour les une·s, elle per­met de mieux se connaître. Pour les autres, elle fait car­ré­ment figure d’outil poli­tique. Qu’on y croit ou pas, une chose est sûre : l’astrologie fait son grand retour. Et elle est plus queer et plus fémi­niste que jamais.

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© Georgie Smith

Dans l’obscurité bon­dée de La Mutinerie, petit bar fémi­niste et haut lieu de la culture les­bienne à Paris, scin­tillent ça et là les signes du Verseau, du Sagittaire ou des Poissons. Ce soir-​là, l’astro-logie s’affiche en pen­den­tif. Plutôt de rigueur, puisqu’on fête la pre­mière année d’@ Astrologouine, un compte Instagram qui lui est consa­cré. Pour l’occasion, son col­lec­tif artis­tique, Super saphique, a sor­ti le grand jeu : tirages de tarot et lec­tures de cartes astrales. Et à en juger par l’interminable file d’attente, le public en raf­fole. Un public jeune, fémi­nin et fémi­niste, à l’image de Lucile, 23 ans, qui tra­vaille pour une orga­ni­sa­tion consa­crée aux femmes, dans un bâti­ment où gra­vitent plu­sieurs asso­cia­tions, toutes fémi­nistes. « Quand on se retrouve à la pause déj, on finit tou­jours par par­ler d’astrologie. Lorsqu’il y a une nou­velle venue ou que l’une de nous a un crush, l’une des pre­mières ques­tions c’est : “Quel est ton signe ?” » raconte la jeune femme, née sous le signe du Cancer.

Longtemps clas­sée au rang des lubies un peu hon­teuses, voire fran­che­ment rin­gardes, l’astrologie a la cote chez les Millennials. Sur Instagram, où le hash­tag #Astro cumule plus de 3,6 mil­lions d’occurrences, elle se réin­vente à coups de “memes” (des images détour­nées et flo­quées d’un texte drôle) et de comptes dédiés : @ NotAllGeminis (547 000 abonné·es, c’est le plus popu­laire), la très ‑recon­nue @ ChaniNicholas (qui vient de publier You Were Born For This aux édi­tions HarperOne, 2020, un ouvrage sur l’astrologie comme « voie radi­cale d’acceptation de soi »), @ AstromemeQueen, @ TrashbagAstrology, @ Astrotruc… Dopées à l’humour et aux réfé­rences pop, nombre de ces pages affichent leur sen­si­bi­li­té queer et fémi­niste, comme celle de l’Américaine @ TheVoluptuousWitch (littéra-​lement, « la sor­cière volup­tueuse ») ou de la Française @ Astrologouine, qui rédige ses « astro­memes » en écri­ture inclu­sive. Début 2019, l’appli de ren­contres Bumble, qui se targue de « don­ner le pou­voir aux femmes », ajou­tait quant à elle un filtre « zodiaque » per­met­tant à ses utilisateur·trices de ren­sei­gner leur signe astral. La même année, un stand astro s’invitait au fes­ti­val fémi­niste Comme nous brû­lons, entre concerts et tables rondes poli­tiques. À l’automne 2019, Meteor, tout nou­veau pod­cast « astro­lo­gique et sans glu­ten », invi­tait au micro plu­sieurs figures fémi­nistes, dont la mili­tante Daria Marx et la pod­cas­teuse Anouck Perry. Un phé­no­mène qui s’observe jusque dans la défer­lante de mugs, tee-​shirts, sacs, jeux de tarot qui convoquent ico­no­gra­phie fémi­niste, esthé­tique éso­té­rique… et désor­mais astro­lo­gie (lire page 43). Laquelle est au cœur d’un effet de mode, mais semble aus­si répondre aux pré­oc­cu­pa­tions intimes et poli­tiques d’une jeu­nesse en quête de sens.

“Se sen­tir sorcière”

Fini l’horoscope à l’ancienne qui pré­ten­dait révé­ler notre des­tin. Sous ses airs pop et légers, l’astro telle qu’elle se pra­tique dans ces sphères alter­na­tives ne vise pas tant à pré­dire l’avenir qu’à se connaître soi-​même. « Contrairement à l’astrologie pré­dic­tive, l’astrologie ana­ly­tique s’intéresse à la carte astrale, donc à la posi­tion des pla­nètes au moment de notre nais­sance », décrypte Eugénie Lempaszak, alias @ Astrologouine, et Verseau de son état. Une approche qui prend en compte le signe solaire (celui que tout le monde connaît), mais aus­si la posi­tion de la Lune et[…]

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