Promesse d'Olivier Véran, alors ministre de la Santé, en 2022, le décret que s'apprête à publier le gouvernement concernant l'affichage de la composition des serviettes et tampons s'annonce complètement essoré de sa substance. Pour les assos, il « n’est pas du tout à la hauteur ».
« Chaque femme saura ce qu'il y a dans son tampon ou dans sa serviette » promettait Olivier Véran en 2022. L'alors ministre de la Santé - aujourd'hui porte-parole du gouvernement - annonçait en ces termes un décret gouvernemental sur la transparence de la composition des protections périodiques, afin de protéger la santé des femmes. À l'heure actuelle, les consommatrices ne savent toujours pas quels sont les matériaux et autres substances chimiques qui sont utilisés pour fabriquer leurs protections périodiques alors que ces produits sont en contact direct avec leurs muqueuses.
Depuis plusieurs années désormais, associations féministes (Georgette Sand, Règles élémentaires, Fondation des femmes...) et associations de consommateur·rices se mobilisent pour exiger que les pouvoirs publics ordonnent aux industriels de faire œuvre de transparence. En effet, les serviettes et les tampons font régulièrement l'objet d'études scientifiques pointant la toxicité des produits entrant dans leurs compositions : on trouve ainsi des traces... D'hydrocarbures et de pesticides.
Des formulations amènes avec les industriels
Le contenu du décret qui devrait être publié début juillet et qu'a révélé Le Journal du dimanche samedi 27 mai a de quoi décevoir les associations : contrairement à la promesse d'Olivier Véran, le gouvernement ne va pas obliger pas les fabricants à indiquer l'intégralité des produits présents dans leurs produits de protection intime. Ainsi, le décret prévoit « l’obligation d’affichage, sur les emballages ou une notice, de chacun des composants et des produits ajoutés intentionnellement lors du processus de fabrication ». Des formulations amènes avec les industriels qui douchent les espoirs des associations. « Nous avons le regret de constater que la version finale du texte est aujourd'hui complètement vidée de sa substance », dénoncent la Fondation des femmes, Règles élémentaires et Georgette Sand, collectif à la pointe due ce combat dans une pétition. Ce n’est pas du tout à la hauteur de nos espérances et des promesses qui ont été faites. »
Intitulée Pour une vraie transparence sur la composition des protections périodiques, elle exige que le décret soit à la hauteur des enjeux de santé publique. Ce qu'elles dénoncent : la formulation « l’obligation d’affichage, sur les emballages ou une notice » signifie que les industriels vont pouvoir se passer d'indiquer la composition sur les boîtes des produits. De même, la notion de « produits ajoutés intentionnellement » amoindrit grandement la portée du texte : « La quasi totalité des résidus potentiellement toxiques retrouvés à ce jour dans les protections périodiques seraient issues, soit d’une contamination des matières premières ou des produits finis, soit formées lors des procédés de fabrication (ex. blanchiment, collage », rappelle la pétition.
Plus de 10.000 signataires
Les informations risquent donc d'être partielles et planquées mais ce n'est pas tout : pour l'heure, seules soient concernées par le décret les protections jetables : « Les protections textiles seront exempts de cette obligation d’affichage, s'inquiètent les pétitionnaires. Aujourd’hui, le marché des protections réutilisables, en particulier des culottes menstruelles, est en pleine expansion. Récemment, des produits potentiellement toxiques ont aussi été trouvés dans ces culottes. Il y a donc un enjeu à inclure les produits menstruels explicitement textiles dans le décret. » Partagée sur les réseaux sociaux avec le hashtag #AfficheTaCompo, la pétition a pour l'heure été signée par plus de 10.000 personnes à cette date,
Syndrome du choc toxique : le responsable est une bactérie
Selon l'Agence nationale de sécurité sanitaire alimentation, environnement, travail (Anses), le Syndrome du choc toxique (SCT) n'a pas de lien avec la composition des protections périodiques. Dans son avis publié en 2019 Sécurité des produits de protections intimes, l'Anses écrit : « L’hypothèse d’un lien entre le risque de SCT menstruel et la composition de ces produits ou la présence de substances chimiques résiduelles a été émise par les experts. Cependant, aucun élément de la littérature scientifique et selon les résultats de cette saisine, ne permet, à ce jour, de confirmer ou d’infirmer cette hypothèse. »
L'instance publique rappelle que le SCT - une vingtaine de cas annuels en France depuis 2010 selon le Centre national de référence (CNR) des staphylocoques (Lyon) - est dû à une infection bactérienne lors de l'utilisation de protections périodiques internes (tampons et coupes menstruelles). « Le risque de développer un SCT menstruel augmente avec la durée de port des protections internes », indique l'Anses, c'est-à-dire au-delà des 8 heures indiquées par les industriels.