S’il y a un sujet qui charrie son lot de mythes, c’est bien la sexualité féminine. Mais que nous dit la mythologie, la vraie, sur le clitoris ? Y a‑t‑il une place pour le bouton de rose dans les affaires divines ? Pour le savoir, Causette s’est penchée sur les petits secrets des dieux…
Non, le clitoris n’a pas toujours été ce « soldat inconnu » de la sexualité féminine. Dans la Grèce antique, ce brave petit organe aurait même fait l’objet d’un mythe. Oui madame ! Il y a bien longtemps, dans une lointaine contrée de Thessalie, au sud de la Macédoine, vivait une jeune femme répondant au doux nom de Clitoris. Fille d’un Myrmidon (homme-fourmi), la minuscule donzelle était, raconte‑t‑on, d’une beauté à couper le souffle. Ce qui n’avait pas échappé à Zeus : un beau matin, cet impénitent coureur de jupons jeta son dévolu sur elle. Jamais à court d’idées pour mettre une fille dans son lit, le maître des cieux se transforma donc en fourmi pour faire l’amour à la belle. Et depuis ce temps-là, on appelle l’organe du plaisir féminin le « clitoris », en référence à la petite taille de sa dulcinée… Plutôt mignon, non ?
Bon, recherches faites, il semble que cette légende, qui circule ici et là, ait été un poil déformée. « Vous allez être déçues : ce mythe n’existe pas ! C’est une mauvaise interprétation », nous apprend Stéphanie Wyler, maître de conférences en histoire et anthropologie des mondes romains à l’université Paris-Diderot *. On trouve des sources de cette histoire chez des auteurs chrétiens du IIIe siècle après J.-C. qui critiquaient la mythologie classique. C’est là que le mot clitorisiria apparaît. Mais c’est une déclinaison d’un mot latin qui signifie “fille de Clitor”. » Dans la mythologie grecque, Clitor (Kleitôr en grec) est un roi de Thessalie, et sa fille se prénomme en réalité Euryméduse. Si cette princesse est passée à la postérité, c’est bien parce qu’elle a reçu la visite de Zeus transformé en fourmi. Mais aussi parce que leurs ébats ont donné naissance à un certain Myrmidon, père de la troupe des Myrmidons (des guerriers que l’on retrouvera plus tard aux côtés d’Achille durant la guerre de Troie). Autant dire qu’on est loin de notre histoire de berlingot… Si ce n’est, à vrai dire, sur le plan étymologique. Car c’est bien en Grèce antique qu’on retrouve la racine du mot « clitoris ». « Le terme vient de kleiô, qui veut dire “fermer”. Le roi Kleitôr, littéralement “le fermeur”, s’appelle ainsi parce qu’il doit détenir des choses, des secrets, des pouvoirs. Quant au mot féminin kleitoris, il signifie “la fermeuse”, c’est la métaphore d’une clé », décrypte Stéphanie Wyler. Et que permet-elle d’ouvrir, cette clé ? On vous le donne en mille : dans la littérature érotique de l’époque, il n’était pas rare que le sexe féminin soit symbolisé par… une porte, précédée d’un vestibule (le clitoris). Tout est bien qui finit bien !
* Elle a notamment écrit Dieux et hommes dans l’Antiquité (VIIIe siècle avant J.-C. – Ve siècle après J.-C.). Éd. Les Belles Lettres, 2011.
Oracle, dis-moi qui a la plus grosse (jouissance)
De l’homme ou de la femme, qui a le plaisir sexuel le plus intense ? Cette question, qui fait encore couler beaucoup d’encre, a valu une belle scène de ménage à Zeus et à sa femme Héra. Incapable de tomber d’accord, le couple divin fit donc appel à un certain Tirésias. Un arbitre idéal : après avoir blessé deux serpents qui s’accouplaient, celui-ci s’est retrouvé dans la peau d’une femme durant sept ans avant de redevenir un homme. Et c’est à Zeus qu’il donna raison : l’orgasme féminin est plus puissant, jugea-t-il, estimant que « des dix-neuf parties qui compo-saient le plaisir amoureux, la femme en éprouvait dix, et l’homme seu-le-ment neuf ». Furieuse d’avoir perdu son pari et de voir le secret de son sexe révélé, Héra décida alors de rendre aveugle le bonhomme. Sort que Zeus compensa en lui donnant le pouvoir de divination, ce qui lui conféra le surnom de « devin aveugle de Thèbes ».