En attendant que la loi PMA pour toutes soit enfin votée définitivement, théoriquement cet été, Causette est allée à la rencontre de ces Françaises qui ne l'ont pas attendue.

« Maman a choisi ton géniteur sur catalogue par Internet ! » Concevoir, pipette à la main, les pieds en l’air dans son salon ou traversant seule les frontières en quête de sperme inconnu, l’image est nouvelle et de moins en moins rare. Au Danemark, c’est même « un choix de vie tout à fait accepté et normal. Des groupes pour mamans solos sont régulièrement organisés », explique Helene Jakobsen, une coach en fertilité dans ce pays où la procréation médicalement assistée (PMA) est légale et remboursée pour les femmes seules depuis… 2007 ! Ces derniers temps, le sigle SMC (single mother by choice) s’est également imposé dans le lexique des pays anglo-saxons. Ces derniers ont vu le nombre de femmes créant leur propre famille monoparentale augmenter fortement après la légalisation de ces pratiques : au Royaume-Uni, le nombre de femmes seules faisant une fécondation in vitro (FIV) en utilisant leurs propres ovocytes avec un donneur de sperme est passé de 531 en 2008, date de l’extension de la PMA, à 1 352 en 2018.
En français, l’expression « monomaternité choisie » n’a pas encore pris son essor, mais pourrait s’imposer si la loi de bioéthique, qui fait actuellement les frais d’une bataille législative au Sénat et à l’Assemblée, passe en 2021 : la PMA pour femmes seules est encore illégale en France, car réservée aux couples hétérosexuels. Encore marginal, le phénomène pourrait doubler, voire tripler : on estimait déjà en 2017 qu’entre 2 000 et 3 000 femmes par an n’avaient pas attendu la loi pour aller réaliser une PMA à l’étranger. Et, selon la principale banque de sperme, Cryos, en 2020, 44 % des clientes françaises étaient célibataires.
Nécessité, urgence, besoin, choix : comment en arrive-t-on là ? Il peut s’agir d’un dernier recours envisagé lorsque le désir d’enfant se heurte à la baisse de la fertilité féminine, à partir de 35 ans : « J’ai toujours voulu des enfants et, vers 30 ans, je disais que j’en ferais coûte que coûte, explique Sarah, 37 ans. J’ai toujours espéré le faire avec quelqu’un, mais je n’ai pas rencontré la bonne personne. Au bout d’un moment, j’ai eu un déclic : quand j’étais à Barcelone, il y a trois ans, j’ai vu une femme avec un petit enfant, à un concert. Je me suis fait un film en imaginant qu’elle l’élevait toute seule et je trouvais leur complicité très belle. Je me suis dit : “C’est possible !” » En pleine crise du Covid-19, elle a ainsi commencé son parcours d’insémination à la clinique Eugin, « une usine à bébés » en Espagne, pays d’où est originaire sa grand-mère. Et comptabilise pour l’instant deux tentatives infructueuses.
Parcours de la combattante

« La maternité solo se fait rarement sur un coup de tête », remarque la sociologue Virginie Rozée, à l’Institut national d’études démographiques (Ined). Celles qui l’ont vécue sont formelles : ce parcours de la combattante demande une préparation minutieuse. D’abord, s’octroyer une période de réflexion. Ensuite, emmagasiner un petit pactole, car l’ensemble des démarches, dont certaines sont remboursées par la Sécurité sociale, coûte, en moyenne, entre 5 000 et 7 000 euros. Puis assimiler une somme d’informations glanées sur Internet auprès d’associations, de forums ou de groupes Facebook. La méthode plébiscitée reste le don de gamètes à l’étranger : dès lors, faut-il choisir l’insémination, moins coûteuse, ou la FIV, plus invasive, mais plus efficace ? Se décider pour un[…]