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Les 20 plumes fémi­nines : Alexandra Dezzi

Cette année encore, on risque de se faire assom­mer par la vague des sor­ties de livres à l’occasion de la sacro-​sainte ren­trée lit­té­raire. Et pour affron­ter l’autre deuxième vague – au cas où on nous recon­fi­ne­rait –, mieux vaut s’armer de bonnes lec­tures. Causette n’a choi­si que des autrices. Discrimination posi­tive assu­mée. Des plumes belles et rebelles qui ne devraient pas vous lais­ser indemnes. Voici celle d'Alexandra Dezzi.

114 Alexandra Dezzi © Melchior Tersen
© Melchior Tersen

On ne connaî­tra jamais son nom à elle, ses amants ne sont que des numé­ros et ses mots sont des coups. Telle est la pro­ta­go­niste de La Colère. Une jeune Parisienne d’aujourd’hui. Elle est rap­peuse, elle peine sur son nou­vel album, écrit un roman, suit une psy­cha­na­lyse et, sur­tout : elle passe des heures à s’entraîner sur les rings de boxe, où, jus­te­ment, elle ren­contre les corps, ceux des hommes, se mesure à eux avant d’en mener cer­tains vers d’autres lits. La Colère éro­tise tous les corps-​à-​corps, sexuels comme pugi­lis­tiques, soli­taires comme à deux : « Te bran­ler ou te mus­cler revient à la même chose, c’est une façon de nier la mort », déclare la nar­ra­trice. Ce tu, cette voix, ajoute d’ailleurs au trouble, car vous met­trez du temps à com­prendre d’où elle parle exac­te­ment. Et pour­quoi. Quelque part entre Louis Calaferte, Nina Bouraoui et des autrices actuelles comme Constance Debré ou Blandine Rinkel, Alexandra Dezzi déploie une écri­ture exci­tante, pro­vo­cante, pour un face-​à-​face avec son propre sujet (désir, confiance, dépos­ses­sion de soi). S’il n’y avait cette éner­gie splen­dide, ce deuxième roman (après Silence, radieux, éd. Léo Scheer, 2018) ne serait qu’autofiction : Dezzi est, elle aus­si, musi­cienne (elle a for­mé avec sa sœur le groupe rap élec­tro Orties, un album au comp­teur et un second jamais fini) et autrice. Mais La Colère évite les pièges du roman de désir, pour vous prendre au col, vous frap­per l’esprit, et deve­nir un texte étour­dis­sant, en mou­ve­ment, en urgence. 

La Colère, d’Alexandra Dezzi. Éd. Stock, 224 pages, 18,50 euros.

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