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Le conseil de lec­ture de Daniel Pennac : « Retenir les bêtes », de Magnus Mills

Chaque mois, un·e auteur·e que Causette aime nous confie l’un de ses coups de cœur littéraires.

PENNAC Daniel Photo 2018 Francesca Mantovani Editions Gallimard 429V2
© F. Mantovani /​Gallimard

Assez com­pli­quée, cette his­toire de pépite. Rien que ces der­niers temps, entre La Petite Lumière, d’Antonio Moresco, chez Verdier ; D’acier, de Silvia Avallone, chez Liana Levi ; Une his­toire de France, de Joffrine Donnadieu, chez Gallimard ; Le Ghetto inté­rieur, de Santiago H. Amigorena, chez P.O.L, j’ai crou­lé sous les pépites. Mais non, râlait Causette, on veut du moins connu, du raris­sime. J’ai dit je n’ai pas ça en maga­sin et j’ai raccroché.

Puis, je me suis sou­ve­nu. Ça ­s’appelait Retenir les bêtes. D’un cer­tain Magnus Mills. Un Anglais. Ça ne racon­tait abso­lu­ment rien, mais c’était pour­tant le sus­pense des sus­penses ! J’en suis res­té scot­ché dans mon fau­teuil jusqu’à sau­ter mon déjeu­ner et rater le den­tiste. Paralysant, tant chaque page don­nait envie de lire la sui­vante. Que va-​t-​il se pas­ser ? Que va-​t-​il se pas­ser ? Ma mati­née dévo­rée, j’ai per­du l’après-midi à écu­mer les librai­ries pour offrir ce chef‑d’œuvre à tous les amis, des fois qu’il dis­pa­raisse trop vite et qu’il n’en reste plus pour ma tribu… 

Bon, voi­là l’histoire. Elle sera approxi­ma­tive. Je pré­fère m’en tenir au sou­ve­nir de mes sen­sa­tions plu­tôt que de vous ser­vir un résu­mé pêché dans Wikipédia. Comme aurait dit Coluche, c’est l’histoire de trois mecs. Trois types au front plu­tôt bas dont le ­bou­lot consiste à dres­ser des enclos pour « rete­nir les bêtes ». Deux ouvriers et un contre­maître. Des Écossais. Qui, d’un bout à l’autre du roman, tendent du fil de fer bar­be­lé dans des pay­sages abso­lu­ment déso­lés avant d’aller se taper des pintes de Guinness dans des pubs non moins sinistres. C’est tout ce que je peux vous racon­ter. Ah ! si ! Il y a deux évé­ne­ments impor­tants, tout de même. Toutes les deux ou trois heures, l’un des ouvriers demande à l’autre s’il n’aurait pas un clope. L’autre laisse tom­ber le bou­lot, sort un paquet de sèches de sa poche pec­to­rale et en offre une à son col­lègue. Qui la glisse entre ses lèvres. Ici inter­vient le deuxième évé­ne­ment. Après un temps de réflexion, le pre­mier demande au second s’il n’aurait pas du feu. Le second cherche alors son bri­quet dans la poche de son jean. Mais le jean est tel­le­ment ser­ré qu’il met un bon quart d’heure à en extraire le ­bri­quet. Le contre­maître, qui observe la scène, se pose alors la ques­tion capi­tale de savoir pour­quoi ce gars ne range pas son bri­quet avec ses ciga­rettes, ce qui, tout bien réflé­chi, leur ferait perdre moins de temps. Voilà. C’est tout ce que je peux vous racon­ter. Vous en dire plus, ce serait lire à votre place. Ce qui serait très cruel de ma part.

Retenir les bêtes, de Magnus Mills. Éd. Cambourakis (2014), 240 pages, 11 euros.


En librai­rie · La Loi du rêveur

Unknown

Rêveur. Ce n’est ni un passe-​temps ni une pro­fes­sion pour Daniel Pennac. C’est lui tout entier. Au début de son nou­veau roman, La Loi du rêveur, il campe un petit nar­ra­teur de 10 ans qui, un jour, fait un drôle de rêve : une ville englou­tie sous les eaux. Déterminé à tout décor­ti­quer, à com­prendre ce que ce rêve peut avoir de pré­mo­ni­toire, quitte à y pas­ser sa vie entière, ce gamin écla­tant de drô­le­rie et de saga­ci­té par­vient, par la puis­sance de son ima­gi­na­tion, à mener le monde en bateau : son meilleur ami, ses parents, des années plus tard son épouse, ses enfants… et, bien sûr, nous, ses lec­teurs et lec­trices. Blagueur devant l’éternel, Pennac nous raconte-​t-​il une his­toire vraie, un rêve éveillé, ou entiè­re­ment réin­ven­té ? Peu importe. Il pro­fite sur­tout de cette fable exal­tante pour rendre hom­mage à celui qu’il consi­dère comme son maître en tout, le « cham­pion des rêveurs », le cinéaste Federico Fellini. C’est une décla­ra­tion d’amour à l’art et à la lit­té­ra­ture, à ces spec­tacles qui, comme le dit Fellini, com­mencent « dès qu’on ferme les yeux »Lauren Malka

La Loi du rêveur, de Daniel Pennac. Éd. Gallimard, 176 pages, 17 euros. Sortie le 3 jan­vier 2020. 

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