La photographe Carmen Abd Ali travaille pour des ONG en Afrique de l’Ouest. C’est en Mauritanie qu’elle a découvert la pratique du gavage des femmes, « mbelha » en hassaniya (dialecte arabe). La population maure considère depuis des temps immémoriaux l’obésité comme un critère de beauté absolu pour les femmes. C’est pourquoi, très jeunes, les filles ingurgitent des nourritures à base de bouillies, de lait de chèvre et de poudre de mil, en quantités astronomiques. Aujourd’hui, des médicaments détournés, parfois même vétérinaires, presque toujours dangereux, sont utilisés pour leurs effets secondaires spectaculaires sur les courbes féminines. Avec Le projet Mbelha, Carmen Abd Ali a voulu donner une voix aux Mauritaniennes, qu’elle a photographiées, interviewées et impliquées dans sa démarche artistique. Son travail, confie-t-elle, « questionne l’influence et l’impact des normes de beauté sur les femmes, leur corps et leur image », et l’absurdité de ces normes qui, où que ce soit, desservent les femmes puisqu’en Occident, à l’inverse, c’est l’obsession de la minceur qui domine. Là encore, parfois, au prix de la santé.
À travers les époques et les pays, en plusieurs expositions et ouvrages, depuis qu’elle a commencé à faire de la photo et jusqu’à nouvel ordre, elle souhaite raconter « une histoire de la misogynie ».